« De Humani Corporis Fabrica » : quand le cinéma dissèque nos corps humains et socio-politiques

Par
Publié le 03/01/2023

Crédit photo : DR

« Le corps comme vous ne l'avez jamais vu » : tel est le voyage que proposent aux spectateurs les cinéastes Verena Paravel et Lucien Castaing-Taylor dans leur quatrième film, « De Humani Corporis Fabrica ». Le titre fait référence au traité d'anatomie en sept volumes publié par Vésale en 1543, et le film présente en effet des images fascinantes du corps humain sous toutes ses coutures, entre horreur et beauté. Ceci grâce à un travail de montage de différentes sources : IRM, robots, microscopes ; visions venues d'une mini-caméra créée pour le tournage ; vues des caméras scialytiques qui surplombent la table d'opération…

Mais le geste artistique du duo d'anthropologues va au-delà, et sonde aussi le corps de l'hôpital, dont on parcourt les couloirs comme on s'engouffre dans les boyaux ou les artères. Résultat de cinq à sept années de travail, et de plusieurs mois de tournage essentiellement dans les hôpitaux parisiens de Beaujon et de Bichat, « De Humani » nous plonge dans tous ses membres et organes : ophtalmologie, réanimation, maternité, neurologie, urologie, oncologie, mais aussi imagerie, psychiatrie, gériatrie, chambre mortuaire, orthopédie… Et même éthique ! « L'hôpital est lui-même un corps, un corps qui contient des corps et les travaille. Le film est l'étude anatomique de ce corps-là », explique Verena Paravel.

Vie et mort, progrès et solitude

De cette immersion totalisante, se dégage un constat implacable. Le corps humain comme le corps médical est l'espace-temps où s'entrechoquent les contraires : la vie et la mort ; la médecine la plus pointue grâce à laquelle on peut voir l'intérieur du cerveau et les interventions les plus prosaïques, où l'on redresse une scoliose à l'aide de barres de fer et de boulons. Les promesses de la science, et les solitudes des patients et des soignants. « À l'hôpital, on éprouve plus qu'ailleurs tout autant la fragilité du vivant et la présence de la mort que les extraordinaires ressources qui sont du côté de la vie, la pulsation vitale dans la matière même qui nous compose », décrit Verena Paravel.

Le documentaire se passe de commentaires et de séquences d'interviews ; il laisse entendre la parole des soignants en action. S'y exprime une immense lassitude voire souffrance face à des conditions de travail impossible (« 45 patients opérés par semaine, je suis un robot. Je n'ai même plus d'érection », souffle un urologue) et à un manque de reconnaissance criant (« 320 nuits blanches pour un pin's », lâche une réanimatrice à un interne). Se dégage aussi beaucoup de tendresse, d'humanité et de dévouement.

Alors que le film se termine en salle de garde sur l'élan vital de la chanson « I will survive », s'élève une question éminemment politique et de plain-pied avec le contexte actuel : « Comment ? »

Découvrez le film en avant-première avec « Le Quotidien du Médecin »

Partenaire du film, « Le Quotidien du Médecin » vous propose de gagner 20 places pour l'avant-première de « De Humani Corporis Fabrica » de Verena Paravel et Lucien Castaing-Taylor, le samedi 7 janvier à 19h30 au cinéma Le Reflet Médicis - 3, rue Champollion, 75005 Paris. La projection sera suivie d'une rencontre avec les cinéastes. Inscription à : distribution@filmsdulosange.fr  

Retrouvez les réalisateurs Verena Paravel et Lucien Castaing-Taylor dans un grand entretien, publié dans « Le Quotidien du Médecin » du 13 janvier.


Source : lequotidiendumedecin.fr