Le tribunal judiciaire de Paris a estimé ce mercredi 5 janvier que Sanofi avait « commis une faute en manquant à son obligation de vigilance et à son obligation d’information » sur les risques de son médicament Dépakine (valproate de sodium) pour le fœtus en cas de prise pendant la grossesse. Il a par ailleurs jugé « recevable » l'action de groupe lancée à l'initiative de l'Association d'aide aux parents d'enfants souffrant du syndrome de l'anti-convulsivant (Apesac), ouvrant la voie à une première judiciaire en France dans le domaine de la santé. Sanofi a annoncé son intention de faire appel du jugement.
L'action de groupe avait été lancée en mai 2017 par Apesac, qui considère que Sanofi a trop tardé à informer les patientes des risques de malformations ou de retards de développement chez les enfants dont les mères avaient reçu ce traitement pendant la grossesse.
Le valproate de sodium est commercialisé depuis 1967 sous les marques Dépakine (pour les patients épileptiques), Dépakote et Dépamide (pour les patients bipolaires), ainsi que sous des marques génériques. Cette molécule serait responsable de malformations chez 2 150 à 4 100 enfants et de troubles neurodéveloppementaux chez 16 600 à 30 400 enfants, selon des estimations de l'Assurance-maladie et de l'Agence du médicament (ANSM).
L'ANSM déjà mise en cause pour homicides involontaires
En juillet 2020, la justice administrative avait déjà reconnu pour la première fois la responsabilité de l'État - condamné à indemniser plusieurs familles d'enfants lourdement handicapés - ainsi que celle de Sanofi et de médecins. Dans l'enquête pénale, Sanofi et l'ANSM ont été mis en examen en 2020 pour « homicides involontaires » notamment.
Dans son jugement, le tribunal judiciaire de Paris fixe entre 1984 et 2006 la période de temps durant laquelle le risque de malformations congénitales n'a pas suffisamment été pris en compte. Pour les troubles neurodéveloppementaux, qui ont mis plus de temps à être reconnus, il réduit cette période à 2001-2006.
Le tribunal de Paris ordonne aussi qu'une large publicité soit faite à la possibilité ouverte aux patientes et à leurs enfants de participer à cette action de groupe. Les femmes concernées et leurs enfants nés entre 1984 et janvier 2006 pour les malformations congénitales et entre 2001 et janvier 2006 pour les troubles développementaux et cognitifs disposent de cinq ans pour le faire.
En raison des risques encourus, cette molécule est contre-indiquée depuis plusieurs années pour les filles, adolescentes, femmes en âge de procréer et femmes enceintes. « Ces médicaments ne doivent pas être prescrits chez ces patientes, sauf en cas d'inefficacité ou d'intolérance aux alternatives médicamenteuses », indique l'ANSM.
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