L’IMPACT d’une alimentation insuffisante et déséquilibrée sur la santé, avec notamment une prévalence accrue de l’obésité, du diabète, de l’hypertension, des états dépressifs et de graves problèmes dentaires a déjà été démontré dans différentes études. L’enquête inédite présentée hier par le Pr Claude Jaffiol et le Dr Denise Vanneraud lors d’une séance délocalisée à Montpellier de l’Académie nationale de médecine le confirme. Elle a été réalisée en Languedoc, principalement à Montpellier, auprès de 1 855 adultes, la plupart précaires dont 163 sont des diabétiques connus. Les sujets diabétiques de l’étude vont être comparés à 126 diabétiques, majoritairement non précaires, recrutés dans le réseau Audiab de Narbonne qui regroupe de nombreux généralistes prenant en charge des diabétiques.
Avec 3,7 millions à 7,1 millions de personnes pauvres en France, « la situation est plus qu’alarmante », soulignent les auteurs. En 2006, on estime que 13,2 % des Français vivaient en dessous du seuil de pauvreté. En Languedoc-Roussillon, ce taux oscille entre 14,6 et 18,1 %.
Les résultats préliminaires de l’enquête, dont le recrutement s’est achevé en avril 2010, montrent que, dans cette région particulièrement touchée, la précarité s’étend de façon inquiétante particulièrement chez les jeunes : le nombre de sans-abri s’accroît dès 18 ans. Consommation de boissons alcoolisées et de drogues aident à supporter le manque de projet de vie, le chômage et la solitude, « surtout chez les ressortissants français, les populations maghrébines ou des pays de l’Est étant beaucoup plus solidaires », relèvent les auteurs. Les plus de 50 ans, eux, souffrent plus d’une alimentation nettement insuffisante : manque de protéines, de fruits et de légumes – trop chers. « Il n’est pas rare d’observer à ces âges une gêne à fréquenter les restaurants sociaux », notent-ils. Ces restaurants solidaires, même s’ils « ont fait d’énormes progrès dans les choix alimentaires et l’éducation nutritionnelle avec entre autres la création d’ateliers diététiques », ne prennent pas en compte « les nombreuses pathologies dont souffrent les précaires », soulignent-ils. Diabète sucré, problèmes digestifs après intervention sur l’estomac ou le côlon ainsi que les problèmes dentaires sont souvent présents.
Hypoglycémies fréquentes.
L’obésité androïde, le diabète gestationnel, l’hypertension artérielle représentent 30,2 % des pathologies tandis que la prévalence des diabètes a été estimée à 8,33 %. « Pour les diabétiques, la constatation d’épisodes fréquents d’hypoglycémie a été une surprise », indiquent-ils. De plus, les patients ignorent totalement cette complication, qui constitue un facteur aggravant dans un milieu où l’alcool, la drogue et les rixes sont fréquents.
L’étude a aussi permis de découvrir un nombre important (319 patients soit 17,2 %) d’hyperglycémies méconnues, parmi lesquelles ont été individualisés des sujets porteurs d’un diabète authentique. « Nous avons systématiquement informé le médecin traitant de la découverte d’un diabète avec peu de suites car beaucoup de sujets étaient sans couverture sociale », précisent le Pr Jaffiol et le Dr Vanneraud.
Même si la précarité a des causes profondes, comme l’aggravation du chômage, les difficultés de réinsertion professionnelles, les auteurs suggèrent que certaines mesures peu coûteuses pourraient améliorer les choix alimentaires des populations précaires et des pathologies qui en découlent. Leurs propositions sont destinées à agir sur les individus ou les groupes sociaux (éducation nutritionnelle, dépistage des pathologies fréquentes, logement), au niveau des pouvoirs publics et des institutions caritatives (amélioration du fonctionnement de l’aide alimentaire, plus diversifiée et qui tient compte des recommandations du PNSS, des particularismes culturels, des pathologies) mais aussi au niveau de la filière agro-alimentaire et de la grande distribution (production d’aliments de bonne qualité nutritionnelle à des prix acceptables, baisse du coût des fruits et légumes, réduction de la publicité en faveur des aliments gras ou sucrées, interdiction des allégations alimentaires infondées).
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