« LES DONNÉES épidémiologiques disponibles, l’espérance de vie des personnes sans domicile ou vivant à la rue est d’environ 45 ans », souligne la ministre de la Santé dans la lettre de mission adressée au printemps au Dr Vincent Girard, psychiatre, PH à l’hôpital de la Timone, à Marseille. Elle lui demandait d’explorer l’interrelation entre précarité et santé, sur le plan somatique et psychiatrique. Le rapport, réalisé avec les Drs Pascale Estecahandy et Pierre Chauvin, a été remis vendredi à la ministre, en présence de Benoist Apparu, secrétaire d’État chargé du logement et de l’urbanisme, et du préfet Alain Régnier, délégué général pour la coordination de l’hébergement et l’accès au logement des personnes sans-abri ou mal logées. Il met en lumière « à la fois les difficultés du système de soins à répondre aux besoins des personnes, mais aussi l’importance d’avoir un chez soi pour la santé ».
Le tableau, s’accordent à affirmer tous les acteurs de terrain, est « catastrophique » : espérance de vie estimée de 30 à 35 ans inférieure à la population générale, qualité de vie dégradée, violences psychosociales, physiques et sexuelles, grandes difficultés à accéder à des soins effectifs, discriminations allant jusqu’au refus de soins (patients CMU). Et pourtant, des programmes spécifiques et des dispositifs multiples tentent d’apporter des solutions. Leur cloisonnement nuit à leur efficacité, avec des administrations centrales sanitaires (DGS) et sociales (DGAS) qui ne communiquent pas entre elles. D’où la première des cinq recommandations du rapport: décloisonner les divers programmes. Des programmes qui peuvent être très performants mais qu’il convient de doter de dispositifs de coordination et de médiation pour faire travailler tous les acteurs en réseau. Il faudrait donc regrouper les compétences DGS, DGAS, DHOS, DSS autour de la question de la précarité, constituer localement des contrats de santé spécifiques et regrouper, au sein de chaque hôpital toutes les activités de prise en charge des personnes sans abri.
Dans cet esprit, la deuxième recommandation suggère « le tuilage entre le médical et le social » au sein des équipes mobiles d’intervention dans tous les territoires ; des conseils locaux en santé mentale, des maisons d’accompagnement sociosanitaire pourraient voir le jour.
Recours à des travailleurs pairs.
Pour développer ces nouvelles pratiques, la troisième recommandation vise à développer de nouvelles pratiques professionnelles, avec en particulier le recours à des travailleurs pairs, c’est-à-dire des personnes issues de la population cible des projets, qui ont compétence pour exercer une médiation entre usagers dispositifs généraux. Par leur histoire, ils décloisonnent également un monde professionel, avec la bonne distance, dans la proximité géographique, socilogique et existentielle. Dans cet esprit, le Dr Girard propose que soient reconnues les compétences dites profanes, tirées de l’expérience de ces travailleurs pairs, compétences qui lui semblent essentielles pour développer les nouvelles pratiques.
Quatrième recommandation, l’habitat d’urgence et de réinsertion pourrait être amélioré par la création d’une solution habitat thérapeutique semi collectif, en partie autogérée, qui permettrait d’hospitaliser les personnes à domicile, sachant que c’est un d’un véritable logement, comme tout un chacun, que ces personnes ont besoin, et pas seulement d’un hébergement ou d’un abri. Il leur faut « un chez soi d’abord ».
Enfin, le rapport Girard plaide pour la promotion de la recherche et de l’évaluation sur la question du sans-abrisme, avec des enquêtes locales, l’activation de systèmes de surveillance et d’alerte hospitaliers pour mettre au point un tableau de bord annuel de l’état de santé et de la prise en charge sanitaire des personnes sans chez soi.
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