Le brentuximab est venu combler un vide thérapeutique dans le lymphome de Hodgkin récidivant ou réfractaire après greffe de moelle. Son efficacité suggère une nouvelle indication en prévention. Selon une étude internationale menée dans 78 pays et publiée dans le « Lancet », l’anticorps monoclonal, autorisé dans près de 50 pays à travers le monde, dont la France, sur la base de données limitées, est non seulement légitime mais son utilisation peut être poussée beaucoup plus loin. L’essai de phase 3 propose que le brentuximab soit administré comme traitement de consolidation précoce après greffe de moelle chez les sujets « à haut risque ».
Survie améliorée
Pour près de la moitié des patients ayant un lymphome de Hodgkin réfractaire ou en rechute, la guérison est assurée après une chimiothérapie intensive suivie d’une greffe de moelle autologue. Mais pour l’autre moitié, avant l’arrivée du brentuximab, il n’existait aucun traitement standard. Le pronostic était sombre avec plus de 90 % des patients en rechute après greffe de cellules souches hématopoïétiques (CSH) autologues. Chez ces patients, le brentuximab a donné de bons résultats en portant la survie médiane globale à 40,5 mois.
L’équipe dirigée par le Pr Craig Moskowitz, du Memorial Sloan Kettering Cancer a montré chez 329 patients « à haut risque de rechute » que l’administration précoce du brentuximab après la greffe de moelle améliorait significativement la survie sans rechute. En médiane, cette dernière était doublée, de 42,9 mois dans le groupe brentuximab (n=165) par rapport à 24,1 mois dans le groupe placebo (n=164). Pour le Pr Moskowitz, « Aucun autre traitement disponible aujourd’hui ne donne de tels résultats chez les patients ayant un lymphome de Hodgkin difficile à traiter ».
À 2 ans de suivi, le cancer n’avait pas progressé chez 65 % des patients du groupe brentuximab par rapport à 45 % du groupe placebo. Le cours habituel de la maladie permet de projeter une évolution favorable à plus long terme. « Presque tous les patients qui n’ont pas rechuté à 2 ans peuvent être considérés comme guéris puisqu’une rechute à 2 ans après une greffe est très improbable », estime le Pr Moskowitz. Dans l’étude, les patients à haut risque présentaient l’un des trois facteurs de risque suivants : rechute ou réponse incomplète, après traitement de 1re ligne, atteinte extraganglionnaire ou rechute dans les 12 mois après traitement de 1re ligne.
Une toxicité limitée
Le brentuximab, commercialisé en France sous le nom d’Adcetris, est un anticorps-médicament. Il est composé d’un anticorps monoclonal anti-CD30 qui est lié à un poison du fuseau. La libération de cet agent antinéoplasique se traduit par l’apoptose des cellules tumorales exprimant l’antigène CD30. En Europe, la spécialité a reçu dès 2009 le statut de médicament orphelin puis en octobre 2012 une AMM conditionnelle. La Haute Autorité de santé avait estimé en mars 2013 que l’amélioration du service médical rendu d’Adcentris était importante (ASMR3) dans ses indications de l’AMM, malgré des données d’efficacité limitées à des essais non comparatifs de phase 2.
Dans l’essai, le protocole consistait à l’administration de 16 cycles de brentuximab ou de placebo, une fois toutes les 3 semaines. L’anticorps médicament était plutôt bien toléré. Les effets secondaires les plus fréquents étaient avant tout les neuropathies périphériques, avec une fréquence de 67 % dans le groupe brentuximab versus 13 % dans le groupe témoin, puis les neutropénies, respectivement de 35 % et 12 %. Un tiers des patients du groupe brentuximab a arrêté l’anticorps anti-CD30 en raison de la toxicité.
Qui sont les sujets à « haut risque
»
L’essai AETHERA confirme l’avancée thérapeutique représentée par le brentuximab, dans ces formes difficiles de lymphome de Hodgkin « à haut risque de rechute ». Dans un éditorial attaché, un hématologue de Cologne, le Pr Andreas Engert soulève la délicate question de la population cible : « avec une survie sans rechute à 2 ans d’environ 50 % dans le groupe placebo, le fait que cette population de patients est réellement à haut risque peut être sujet à débat ». Tout le problème est de définir qui sont les patients à « haut risque de rechute ».
Les trois facteurs de risque choisis dans l’étude ne font pas forcément consensus. Dans les lymphomes en rechute, la plupart des équipes ont choisi la survenue de la rechute au stade IV, une rechute dans les 3 mois du traitement initial, l’indice de performance, le volume tumoral et la réponse à la chimiothérapie de sauvetage pour classer le risque en faible, intermédiaire ou élevé. « Un consortium international est en train actuellement de réévaluer l’effet des facteurs de risque chez les patients ayant un lymphome de Hodgkin en rechute afin de définir une population à haut risque ayant besoin d’un traitement de consolidation », conclut l’éditorialiste.
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