IL Y A DIX ANS naissait donc le RAISIN, développement d’un partenariat de l’Institut de veille sanitaire avec les cinq Centres de coordination de la lutte contre les infections nosocomiales (C-CLIN). Philippe Douste-Blazy avait lancé la lutte en 1994 avec un programme national visant à réduire d’un tiers, entre 1995 et 2000, le nombre de ces infections et à contrôler le taux de bactéries multirésistantes aux antibiotiques. Un nouveau programme a suivi en 2005-2008, avec 12 objectifs quantitatifs.
Le problème n’est pas mince, rappellent dans un éditorial Jean-Claude Desenclos (InVS) et Christian Brun-Buisson (hôpital Henri-Mondor, Créteil) : selon une étude multicentrique française menée en 2000, les infections associées aux soins (IAS) contribueraient à 2,8 % des décès hospitaliers, soit 4 200 décès par an. Elles entraînent des épidémies qui peuvent se propager entre établissements, sont une cause importante de handicap et ont un retentissement psychosocial et économique croissant. Or, de 20 à 30 % de ces infections seraient évitables par la mise en œuvre en routine de mesures de prévention.
Les programmes et actions mis en œuvre ont déjà porté leurs fruits. Avec l’obligation de tenue d’un tableau de bord, le pourcentage des établissements chirurgicaux français mettant en œuvre la surveillance des infections du site opératoire (ISO) a plus que doublé, passant de 45,6 % en 2003 à 98,6 % en 2009. Un exemple qui, selon l’étude de Pierre Parneix (C-CLIN Sud-Ouest, Bordeaux), « illustre parfaitement la dynamique de la décennie ».
Les enquêtes quinquennales de prévalence montrent aussi les progrès accomplis : entre 2001 et 2006, la prévalence globale des IN dans les établissements de santé a reculé de 6,9 à 5 % ; mais il faut noter des disparités importantes entre les établissements. Ces mêmes enquêtes montrent la baisse des IN à Staphylococcus aureus résistant à la méticilline (SARM), de 0,49 % en 2001 à 0,29 % en 2006. Un progrès confirmé par le réseau de surveillance des bactéries multirésistantes aux antibiotiques (BMR-RAISIN), avec par exemple, pour la réanimation, une incidence des infections nosocomiales à SARM passée de 2,37 à 1,59 pour 1 000 journées d’hospitalisation entre 2003 et 2007. Et, indique encore Pierre Parneix, les mêmes tendances sont retrouvées pour l’Europe, où la prévalence de la résistance dans l’espèce est passée de 33 % en 2001 à 23 % en 2009.
Le spécialiste souligne un élément fort de cette décennie : l’amélioration de l’observance de l’hygiène des mains grâce la promotion de l’usage des solutions hydroalcooliques, instauré comme méthode de référence en 2001. Dans l’interrégion Sud-Ouest, la proportion de frictions est passée de 15,3 % en 1999 à 48,4 % en 2005, grâce à quoi l’observance globale de l’hygiène des mains a progressé de 41 à 53 %.
Nouvelles menaces.
Mais, relèvent les éditorialistes, tandis que reculaient les infections à SARM, les infections à entérobactéries productrices de bêtalactamases à spectre étendu (EBLSE) augmentaient dans les mêmes hôpitaux, parallèlement à leur implantation dans la communauté. Les deux auteurs parlent d’une « dynamique épidémiologique complexe de la résistance », difficile à contrôler. On l’a vu avec l’apparition récente d’épidémies de bactéries panrésistantes (entérobactéries productrices de carbapénémases, ou EPC). « De nouvelles menaces émergent et nous devons nous y adapter sans retard et sans complaisance », soulignent-ils.
Pour Pierre Parneix, « si des progrès significatifs ont été obtenus dans certains domaines, d’autres restent à accomplir, notamment la déclinaison des préceptes issus des établissements de santé vers le secteur médico-social et l’approche plus globale de l’infection associée aux soins ».
* Organisé par l’InVS, Maison internationale, Cité universitaire.
** Un éditorial et 9 études, numéro triple 15-16-17, 26 avril 2011.
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