SELON UNE ÉQUIPE de chercheurs de l’IRMES – une structure dépendant de l’Institut national du sport (INSEP) et créée en 2006 pour « donner une nouvelle dynamique » au développement de connaissances en matière de recherche médicale appliqué au sport –, les sportifs de haut niveau ont, en général, un équilibre psychologique comparable à celui du reste de la population, voire meilleur. L’étude, publiée le 4 mai dans la revue PLoS ONE, « montre que, contrairement à ce qui a été parfois dit dans les années 1990 sur la rétribution psychologique de la pratique du sport de haut niveau, il n’y a pas d’addiction aux grandes sensations qui aille au-delà de l’équilibre », précise le directeur de l’IRMES, le Pr Jean-François Toussaint.
Conduite par Karine Schaal, cette recherche épidémiologique a été menée pendant deux ans (2008 et 2009), au niveau national, en collaboration avec les Centres de ressource, d’expertise et de performance sportive (CREPS), les centres médico-sportifs et les professionnels du suivi des sportifs de haut niveau. Les résultats ont été obtenus grâce à une grille de lecture commune, à partir de l’entretien médico-psychologique devenu obligatoire en 2006 pour chaque athlète. Au total, plus de 2 000 sportifs de haut niveau ont été pris en compte.
De la même manière que dans la population générale, la prévalence des troubles varie selon le sexe et l’âge. Les troubles anxieux et dépressifs ainsi que les troubles du comportement alimentaire et les troubles du sommeil sont plus l’apanage des femmes. « Mais il faut dire aussi que les femmes communiquent plus facilement sur ces sujets que les hommes », note Karine Schaal. Les comportements agressifs et les abus de substances sont, en revanche, plus fréquents chez les sujets masculins. Les troubles majeurs du comportement alimentaire, tels que l’anorexie et la boulimie, affectent moins de 1 % des sportifs de haut niveau, ce qui correspond au taux rapporté dans la population générale. Les troubles dits mineurs affectent plus les sportifs pratiquant un sport de contact à catégorie de poids (boxe, judo...) mais ils ne font que refléter les contraintes liées à la compétition. Par ailleurs, la prévalence des épisodes dépressifs augmente également avec l’âge.
L’optimisme face au danger.
Le trouble le plus fréquemment identifié, l’« anxiété généralisée », affecte seulement 6 % des sportifs de haut niveau, contre 14 % de la population française du même âge (en moyenne, 18 ans et demi). De même, la dépression majeure est moins fréquente : moins de 1 % chez les sportifs contre 2,6 % dans la population. L’étude met en avant l’importance de l’environnement du sportif. Si une faible minorité des athlètes (4 %) est exposé à un ou plusieurs facteurs environnementaux « néfastes » (dans la sphère familiale, scolaire ou sportive), ceux-ci présentent alors 2 à 3 fois plus de risque de souffrir d’un trouble psychopathologique par rapport aux autres. Les auteurs de l’étude montrent également que les troubles anxieux et dépressifs sont identifiés le plus souvent chez les sportifs (17 %) et les sportives (39 %) pratiquant une discipline esthétique comme la gymnastique, le patinage artistique ou la natation synchronisée. « Cela s’explique sans doute par le fait que la réussite dépend de l’appréciation d’un jury. Or, comme on peut le voir ailleurs dans la littérature, ce facteur, considéré comme un manque de contrôle de la part du sportif, est anxiogène », souligne Karine Schaal. À l’inverse, les troubles dépressifs sont très peu observés dans les sports à risque tels que le parachutisme, le parapente, le deltaplane ou les sports de glisse. Pour la chercheuse, cet équilibre des sportifs découle certainement de leur aptitude à gérer le stress et de leur « biais optimiste face au danger ».
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