Essai de Rennes : le produit testé « répondait aux exigences attendues » selon l'ANSM

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Publié le 18/02/2016
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Crédit photo : S. TOUBON

« La qualité pharmaceutique du produit répondait aux exigences attendues pour un essai clinique », a annoncé, mercredi 17 février, l'Agence nationale de sécurité des médicaments (ANSM) au sujet du médicament testé par le laboratoire Biotrial à Rennes lors de l'essai qui a fait un mort en janvier.

L'agence fait état des résultats de l'investigation en cours du Comité scientifique spécialisé temporaire sur les inhibiteurs de la FAAH (Fatty Acid Amide Hydrolase) qu'elle a créé fin janvier pour la recherche des causes médicales de cet accident mortel et des effets indésirables présentés par 4 autres volontaires. 

Les données relatives à la molécule en cause, au système endocannabinoïde sur lequel elle est supposée agir, au déroulé de l’essai et à son suivi, aux analyses toxicologiques et pharmacologiques ainsi qu’à la physiopathologie des accidents ont été examinées par ce Comité. Celui-ci a pu également constaté que « les résultats des études menées chez l’animal répondaient aux prérequis exigibles et autorisaient par conséquent un passage à l’essai chez l’homme ».

Un effet seuil de la molécule testée

Des anomalies observées à l'IRM chez les volontaires ayant présenté des effets indésirables reflètent des micro atteintes tissulaires cérébrales de sévérité variable, avec une topographie tout à fait inhabituelle.

Alors qu'aucun signal d’alerte n’avait été identifié chez les autres participants à l'essai, que ce soit ceux ayant reçu des doses inférieures à 50 mg en administration quotidienne ou ceux ayant reçu des doses allant jusqu’à 100 mg en dose unique. « La survenue d’effets indésirables graves au terme de 5 ou 6 doses quotidiennes de 50 mg évoque donc un effet seuil, entre 20 mg et 50 mg », conclut le Comité.

« Il est possible qu'il s'agisse d'une substance avec une pharmacocinétique à risque d'accumulation, même s'il est étonnant que les patients ayant reçu les quantités les plus massives en dose unique n'aient présenté aucun symptôme », remarque le Pr François Chast, chef du service de pharmacie clinique des hôpitaux universitaires Paris Centre et président du Comité d’éducation sanitaire et sociale de la pharmacie française (Cespharm).

Parmi les diverses hypothèses avancées par le comité, deux ont été privilégiées : un effet de la molécule dépassant la seule inhibition de la FAAH ou l’effet d’un métabolite résultant de la dégradation du médicament absorbé.

Un nouveau point sur l'enquête d'ici fin mars

« Sans plus d'information sur le métabolisme de ce  produit, on peut imaginer qu'il a des formes de dégradation toxiques pour l'homme ou encore qu'il a été testé avec succès sur des espèces animales insensibles à ses effets indésirables », relève le Pr  Chast.

« Des données complémentaires vont être recueillies dans les prochains jours, afin d’éclairer ces pistes de recherche », a indiqué en conclusion l'ANSM. Une nouvelle réunion du comité scientifique de l'ANSM faire le point d'ici à fin mars.

Ces analyses interviennent en complément de celles conduites avec les autorités judiciaires, l'Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) et le ministère chargé de la santé. Dans un rapport rendu début février, l'IGAS avait reconnu que la procédure avait été « intégralement respectée lors de l'essai » et que le protocole était conforme à la réglementation actuelle.

Mais elle avait également pointé du doigt des « manquements majeurs ». Elle reprochait notamment au laboratoire de ne pas s'être suffisamment informé de l'état de santé du premier volontaire hospitalisé et d'avoir à nouveau administré la molécule aux autres volontaires le lendemain. L'IGAS relevait aussi que le laboratoire avait tardé à signaler l'accident aux autorités.

Betty Mamane

Source : lequotidiendumedecin.fr