« L'an dernier, plus de 47 000 procédures de chirurgie de l'obésité ont été réalisées en France, un chiffre qui a triplé ces cinq dernières années », note le Pr Emmanuel Disse, du service d'endocrinologie, diabète et nutrition au centre hospitalier Lyon-Sud.
Parmi les techniques les plus pratiquées, on retrouve la pose de l'anneau gastrique, qui est cependant en perte de vitesse, la sleeve gastrectomie (consistant à retirer une partie de l'estomac) et le by-pass gastrique. Ces deux techniques représentent actuellement 85 % des actes opératoires. Aux Hospices civils de Lyon (HCL), 200 interventions sont réalisées chaque année, pour moitié sleeve gastrectomie et by-pass pour l'autre moitié. « On ne pose plus d'anneau gastrique car on estime que le bénéfice de la chirurgie n'est pas évident et que la tolérance n'est pas assurée, notamment au niveau social. Il est difficile de manger au restaurant quand on a un anneau par exemple. Et les personnes qui en ont reçu un subissent une deuxième chirurgie de l'obésité dans 30 à 40 % des cas », explique le Pr Disse. Il souligne que les deux techniques de chirurgie bariatrique utilisées permettent d'améliorer la qualité de vie du patient en diminuant de façon significative les complications liées à l'obésité comme le diabète, l'hypertension ou l'apnée du sommeil.
Parcours d'ETP
Néanmoins, le Pr Disse souligne que « l'explosion du nombre d'interventions ne s'est pas accompagnée d'une augmentation du nombre de médecins, d'infirmières et de diététiciennes. Or, le suivi sur les deux premières années doit être important car il peut y avoir des complications lorsque la perte de poids est rapide et importante. Ces complications peuvent aller des risques de dénutrition et de carences vitaminiques jusqu'à l'augmentation du risque suicidaire, qui a été montré chez des patients ayant eu un by-pass gastrique ». Il a constaté qu'actuellement, « 50 % des patients sont perdus de vue deux ans après l'intervention, au moment où le poids se stabilise dans la plupart des établissements ». Une situation qui le préoccupe particulièrement. « Nous récupérons parfois ces patients aux urgences. L'an dernier par exemple, 15 patients de chirurgie bariatrique ont été pris en charge dans nos services de nutrition clinique intensive pour cause de dénutrition et une patiente a développé un épisode d'anorexie mentale. Même si ce sont des traitements efficaces, ce ne sont pas des chirurgies anodines et elles nécessitent un vrai accompagnement avant et après, pluridisciplinaire et prolongé ». Au Centre intégré de l'obésité des Hospices civils de Lyon, le patient est reçu préalablement à toute intervention chirurgicale, afin de faire un bilan personnalisé. Il suit aussi un parcours d'éducation thérapeutique (ETP) comprenant des séances avec une diététicienne et des ateliers collectifs autour de l'activité physique. Ensuite, une commission se réunit pour discuter des dossiers. Elle est composée d'un nutritionniste ou endocrinologue, d'un chirurgien digestif, d'un psychiatre ou psychologue, selon les recommandations de la Haute autorité de santé (HAS), mais aussi d'un pharmacien, d'une diététicienne et d'un anesthésiste.
« On discute 25 dossiers par mois pour définir si le patient a de bonnes indications pour la chirurgie. Ses consommations et comportements alimentaires sont évalués, ainsi que son activité physique, son moral, sa motivation. Nous rejetons environ 20 % des dossiers, souvent à cause de contre-indications d'ordre psychiatrique », détaille le Pr Disse. Et après l'intervention, quand elle a lieu, le patient n'est pas livré à lui-même. « Nous lui proposons quatre rendez-vous de suivi la première année, deux la deuxième année, et une fois par an ensuite », poursuit-il. « Ce suivi nécessite du temps et du personnel. Nous avons quelques craintes au sujet du suivi des patients opérés dans des cliniques privées », explique le médecin. Grâce à ce suivi, seulement 15 à 20 % des patients sont perdus de vue au bout de deux ans. Pour le Pr Disse, il faut que les patients comprennent que « la chirurgie bariatrique n'est pas une solution miracle, c'est un coup de pouce. Mais l'obésité est une maladie chronique et même avec une chirurgie, on reste obèse toute sa vie », conclut-il.
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