LE QUOTIDIEN : Vous proposez l’instauration d’une règle d’or imposant l’équilibre des comptes de l’assurance-maladie. Pourquoi et comment la mettre en œuvre ?
FRANÇOIS FILLON : Un déficit structurel de l’assurance-maladie est moralement et économiquement injustifiable. Nous n’avons pas le droit de faire financer nos dépenses courantes de santé par les générations futures. Autant il est normal de recourir à l’emprunt pour financer des investissements qui leur profiteront, autant rien ne justifie de leur demander de payer pour notre incapacité à réformer. D’un point de vue économique, la dette est un poids qui pèse sur la croissance et nous enlève toute marge de manœuvre. C’est donc une question de discipline collective : voter un PLFSS en équilibre, avoir un vrai mécanisme d’alerte qui oblige à prendre les mesures correctrices nécessaires, en concertation avec tous les acteurs. À terme, cette discipline collective est la garantie de soins de qualité et de justes rémunérations pour les professionnels de santé.
Quel serait l’avantage de la franchise médicale universelle que vous projetez de mettre en place ?
D’abord, cela simplifierait le labyrinthe actuel des tickets modérateurs de taux différents, de la participation forfaitaire de un euro ou des franchises qui existent. Ensuite, ce système contribuerait à la responsabilisation des assurés. Je propose aussi de centrer l’assurance-maladie sur un panier de soins de base. Il ne s’agit pas de faire une médecine à deux vitesses mais de bien répartir les rôles entre ce qui doit être couvert par la solidarité et l’assurance-maladie et ce qui incombe aux choix individuels et aux organismes complémentaires.
Vous prônez une restructuration de la carte hospitalière. Avez-vous évalué le nombre d’établissements, de services et de lits excédentaires ?
Je pars d’un constat que nul ne remet en cause : notre système de soins reste trop centré sur l’hôpital. C’est pourquoi je veux développer la médecine ambulatoire et une meilleure articulation entre médecine de ville et hôpital. Cela passe aussi par la rationalisation du parc hospitalier et une diminution du nombre de lits. C’est un mouvement déjà engagé. Il se heurte ici ou là, pour des raisons faciles à comprendre et souvent légitimes, à des résistances. Cette rationalisation correspond à l’intérêt général, et en particulier à l’accès à des soins de qualité pour les patients. J’ajoute qu’elle s’accompagne d’un bon accès aux soins sur l’ensemble du territoire, avec des facilités d’installation, ainsi qu’un maillage avec des maisons médicales et des structures de petite urgence.
À l’hôpital, vous préconisez le retour aux 39 heures. Quand on voit les tensions à l’AP-HP, ne craignez-vous pas un conflit majeur ?
Je mesure la difficulté. Il en est de même pour les autres fonctions publiques. Il faut dire la vérité : les 35 heures ont été une erreur, et tout particulièrement dans la fonction publique. Il faut donc y mettre fin. C’est une nécessité pour avoir des services publics performants et c’est une nécessité pour les fonctionnaires eux-mêmes qui sont aujourd’hui condamnés au gel des salaires et à des perspectives de carrière bloquées.
Pour les médecins de ville, à quel niveau se situe la « juste rémunération » que vous évoquez ? Le paiement à l’acte doit-il rester prédominant ?
Mon objectif est de garantir aux médecins de ville une juste rémunération à laquelle ils ont droit du fait de leurs études, de leurs responsabilités et de leur dévouement. Ne restons pas figés sur le paiement à l’acte mais développons en complément des modes de rémunération correspondant à des objectifs partagés en termes de santé publique. Je redis qu’un système de nature à garantir l’équilibre financier de l’assurance-maladie est le plus à même d’offrir aux médecins cette juste rémunération.
Si vous êtes élu en 2017, abrogerez-vous la loi de santé, et en particulier le tiers payant généralisé ?
La loi de santé comporte plus de 200 articles dont certains sont positifs. Il n’est pas question de l’abroger. En revanche, tout ce qui touche à la généralisation obligatoire du tiers payant sera revu. Il n’est pas question de l’imposer aux médecins.
À Matignon, vous avez porté la loi HPST, perçue comme liberticide par les médecins libéraux qui s’accommodent mal de la tutelle des ARS. En quoi avez-vous changé, vous qui souhaitez donner encore plus de pouvoirs à ces agences ?
La loi HPST était une loi nécessaire, notamment pour l’hôpital et l’association des cliniques au service public. Je ne regrette pas la création des ARS. Mais leur mise en œuvre s’est accompagnée d’une intervention administrative tatillonne et trop centralisée. Je veux faire des ARS un outil de modernisation associant étroitement les professionnels de santé, dans l’esprit de liberté et de responsabilité qui est le cœur de la réforme que je propose.
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