Plus que jamais après deux années de crise sanitaire liée au Covid-19, l'Agence de la biomédecine (ABM) invite à la réflexion sur le don d'organes et de tissus, à l'occasion de la journée nationale du 22 juin. Avec le slogan, « don d'organes et de tissus, un lien qui nous unit tous », l'institution entend promouvoir les valeurs de solidarité et de collectif… Tout en luttant contre les idées reçues.
« La crise a mis à l'épreuve l'ensemble de la chaîne. Les activités de prélèvement et de greffe se sont poursuivies grâce à la mobilisation de tous les acteurs, mais certaines greffes ont dû être décalées, décourageant les patients. La situation s'améliore mais les attentes restent fortes », a déclaré Emmanuelle Cortot-Boucher, directrice générale de l'ABM.
Une activité qui repart à la hausse en 2021
La crise du Covid s'est traduite par une diminution de 25 % de l'activité de greffe en 2020 en France*, par rapport à 2019, tous organes confondus : 4 417 greffes d'organes ont été réalisées, contre 5 901 en 2019, a rappelé le Pr François Kerbaul, directeur du prélèvement et de la greffe organes-tissus. Parmi elles, 386 ont été réalisées à partir de donneurs vivants (soit - 24 % par rapport à 2019). Il y a eu aussi en 2020, 5 857 greffes de tissus.
« Depuis la fin de l'année 2020, l'activité s'est redressée et celle de prélèvement repart à la hausse depuis début 2021 (3 à 5 % d’augmentation), en dépit de la crise sanitaire, qui frappait l’Île-de-France, les Hauts-de-France, l'Auvergne-Rhône-Alpes », observe le Pr Kerbaul. En particulier, le taux de prélèvement dans le cadre du protocole Maastricht 3 (après limitation et arrêt des traitements), ouvert depuis 2014, a augmenté en 2021 de 23 %. Et entre janvier et mai 2021, 2 107 greffes d’organes ont pu avoir lieu, dont 198 à partir de donneurs vivants (contre 126 en 2020) ; les greffes de cornée ont, elles, progressé de 20 %.
Lutter contre les idées reçues et mieux informer
La nouvelle campagne de sensibilisation de l'ABM entend lutter contre les avis reçus sur le don (notamment via un post instagram de Hugo décrypte) et rappeler les grands principes, à commencer par celui selon lequel nous sommes tous donneurs présumés − à moins d'avoir fait part de son opposition sur le registre national des refus ou de l'avoir fait savoir, par écrit ou oralement, à sa famille. Le taux d'opposition stagne, lui, depuis plusieurs années autour de 33 % (32,6 % pour les premiers mois de 2021). Selon le Pr Kerbaul, la crise sanitaire a renforcé localement le taux d'opposition, jusqu'à 50 % dans certains établissements médiatisés, ou dont la prise en charge a pu être dégradée le temps du Covid. Sans oublier « qu'il y a pu avoir des amalgames entre don d'organe et le scandale du centre du don du corps de Paris Descartes, même s'il s'agit de deux problématiques différentes », ajoute le responsable.
L'ABM souligne d'ailleurs que le prélèvement des organes et des tissus est un acte chirurgical effectué avec le même soin que pour un vivant (les incisions sont refermées, des prothèses artificielles peuvent être posées), sans conséquences sur le choix des obsèques. L'agence tient aussi à rappeler qu'il n'y a pas d'âge pour être donneur (l'état des organes prime) : 40 % ont plus de 65 ans, 21 % plus de 75 ans, et la moyenne se stabilise autour de 57 ans, contre 42 ans il y a 20 ans. En 2019, un donneur de 96 ans a même pu donner son foie.
Un donneur sauve en moyenne trois vies, souligne l'ABM, qui organisera le 2 juillet une grande concertation avec l'ensemble des acteurs pour préparer le plan Greffes 4 2022-2026. Les arbitrages définitifs seront rendus à l'automne par le ministère de la Santé. L'un des enjeux sera notamment le développement des greffes à partir de donneur vivant, a indiqué la DG Emmanuelle Cortot-Boucher.
* Des chiffres comparables se retrouvent en Europe : - 25 % au Royaume-Uni, - 23 % en Espagne, - 12 % en Allemagne.
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