Nous étions familiarisés, grâce à quelques excellents ouvrages qu'il a publiés ces dernières années, avec sa fougue, mais nous ignorions que Jean de Kervasdoué pût aller aussi loin dans sa condamnation non de l'écologie, mais de la philosophie erronée à laquelle elle a donné naissance et qui, depuis longtemps, fausse notre jugement. Fichtre ! Il n'y va pas de main morte. Mais, professeur émérite au Cnam, ingénieur agronome, ingénieur en chef des ponts, eaux et forêts, ancien directeur des hôpitaux (1981-86), il a du répondant. Les médecins le connaissent bien pour l'avoir eu pour interlocuteur et pour l'avoir suivi dans ses multiples activités grâce au « Quotidien du médecin ». Ils ne seront pas surpris par le contenu de son dernier ouvrage : « Ils croient que la nature est bonne », dans lequel il s'en prend à tout ce que l'on raconte à tort sur l'agriculture, l'eau, l'alimentation, l'écologie. Mais la vivacité de ses assauts risque de les déconcerter.
Contresens sur l'alimentation
C'est pourquoi il faut lire attentivement cette vaste démystification du scientisme auquel nous soumettent les écologistes professionnels, non pour écarter d'un revers de la main les disciplines environnementales mais pour replacer des thèmes trop souvent examinés d'une manière passionnelle dans un contexte plus rationnel. Jean de Kervasdoué ne craint pas d'abattre quelques totems, y compris Nicolas Hulot, ce qui fera bondir les admirateurs de l'ancien candidat à la présidence de la République, mais à tous, il oppose avec constance et fermeté les arguments de la science. On nous prédit un avenir apocalyptique alors que, de toute évidence, la misère recule dans le monde, l'espérance de vie ne cesse de croître (pourtant, nous sommes tous censés mourir prématurément des particules du diesel), des centaines de millions de personnes accèdent à la classe moyenne. Le monde ne s'achemine donc pas vers une catastrophe.
Le problème est parfois notre ultra-réactivité aux informations diffusées sans relâche, par exemple à propos de ce qui nous intéresse au plus haut degré, c'est-à-dire l'alimentation, sur laquelle nous sommes constamment alertés, inquiétés, épouvantés. Jean de Kervasdoué nous rappelle les quelques principes de bon sens qui doivent régir notre manière de manger, mais il est furieux de ce que l'on en arrive à faire de la viande rouge un danger aussi grand que l'alcool ou le tabac. Son sujet, c'est l'exagération, qu'il combat avec d'autant plus de vigueur qu'elle complique affreusement la vie des gens, nous prive du confort offert par la modernité et nous amène à adopter des comportements ridicules qu'aucune menace réelle ne justifie. Il va très loin, au point de contester le rôle joué par les pesticides, par exemple, ou de se poser des questions sur la permanence du réchauffement climatique, sur la réintroduction de certaines espèces dans l'espace agricole, sur le choix à faire inéluctablement entre la nature à l'état sauvage et la production agricole.
Il trouvera de nombreux détracteurs, mais aucun qui puisse contester la qualité de son argumentation. « Inventer un nouveau lien avec la nature, écrit-il en conclusion, apprivoiser la pléthore alimentaire, donner leur juste place aux agriculteurs, repenser l'espace et, avec lui, les notions de ville et de campagen pourraient constituer un projet écologue pour l'avenir ». C'est la conclusion du livre et la nôtre en même temps.
(1) Ils croient que la nature est bonne, Robert Laffont, 17 euros
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