LE 11 MARS à 14 h 46, le Japon est frappé par un séisme de magnitude 9 sur l’échelle de Richter, le plus fort jamais enregistré dans le pays. S’ensuit un terrible tsunami qui ravage la côte du nord-est de l’archipel, faisant plus de 20 000 morts et disparus. La catastrophe prend une tournure encore plus dramatique lorsqu’une vague gigantesque provoque l’arrêt des circuits de refroidissement des réacteurs de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi 1. Les installations deviennent hors de contrôle. Une fusion de combustible dans trois des six réacteurs provoque alors des explosions d’hydrogène qui éventrent les bâtiments. Des rejets radioactifs très importants se répandent dans l’atmosphère, l’eau de mer et les sols de la région de Fukushima jusqu’aux quatre coins du globe.
Cet accident, le plus grave depuis la catastrophe de Tchernobyl (Ukraine), contraint les autorités japonaises à évacuer près de 160 000 personnes en un temps record. Une zone interdite est alors instaurée dans un rayon de 20 km autour de la centrale. Le monde entier va suivre les déboires de l’exploitant de Fukushima Daiichi, Tokyo Electric Power (Tepco), dont les équipes d’intervention s’attellent désespérément à refroidir les réacteurs avec des moyens rudimentaires, n’ayant d’autre choix que d’utiliser de l’eau de mer. L’aide internationale s’organise. Un plan d’action est présenté en avril par Tepco et le gouvernement, visant à stabiliser les réacteurs, leurs piscines et maîtriser les rejets radioactifs dans l’environnement. Un système de refroidissement en circuit fermé est par la suite mis en place, limitant les rejets d’eau contaminée vers l’extérieur. « Aujourd’hui, les informations dont nous disposons montrent que les températures dans les ensembles où se trouvent les cœurs endommagés seraient inférieures à 100 degrés », ce qui permet de réduire la pression au sein des enceintes perméables et les rejets dans l’atmosphère, explique Thierry Charles, directeur de la sûreté des installations à l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Une « superstructure » de confinement recouvre aujourd’hui le bâtiment du réacteur N° 1. Les autres réacteurs endommagés bénéficieront prochainement de la même enveloppe métallique. Des opérations de renforcement des piscines des réacteurs sont également menées pour faire face à d’éventuels séismes importants. À l’extérieur des installations, des résines ont été dispersées dans l’ensemble du site pour fixer au sol la contamination et éviter que celle-ci ne soit dispersée par le vent ou l’eau. Sur le site, la situation bien que stabilisée reste précaire et il faudra plusieurs années à l’exploitant pour sortir de cette situation de crise.
Quelles conséquences à long terme ?
Après le traumatisme du tsunami, les Japonais continuent de vivre aujourd’hui avec l’angoisse d’une contamination radioactive. La plupart des réacteurs nucléaires du pays arrêtés au fur et à mesure pour des raisons de maintenance n’ont toujours pas redémarré, face à l’opposition des populations locales. La mesure de la radioactivité dans l’air ou dans les aliments est devenue un réflexe quotidien chez certains habitants. Au niveau sanitaire, les autorités se veulent rassurantes, allégeant progressivement la liste de produits interdits à la consommation. Sur terre, les produits les plus à risque demeurent aujourd’hui les légumes à feuilles, qui captent plus la radioactivité. « Le dépôt de particules venant de l’air est désormais quasi inexistant. Cela explique pourquoi les restrictions alimentaires sont de moins en moins fréquentes, car du fait du métabolisme des végétaux touchés, la radioactivité est au fur et à mesure transférée vers d’autres compartiments. Ainsi, le Césium va s’enfouir progressivement dans les premières couches du sol, suffisamment profondément pour ne plus être présent dans les légumes à feuilles », explique Jean-René Jourdain. Un certain flou perdure s’agissant de la contamination de la chaîne alimentaire au niveau marin. « En ce qui concerne la radioactivité rejetée dans les océans, il y a un phénomène de dilution colossal mais il n’y a jamais eu de quantité de radioactivité aussi importante rejetée dans l’environnement marin », souligne Jean-René Jourdain, délégué auprès du directeur de la radioprotection de l’homme à l’IRSN. « On dispose encore de très peu d’études sur les effets de tels rejets à long terme sur la faune et la flore », ajoute-t-il.
Un suivi des enfants.
Des doutes subsistent par ailleurs au sujet des doses reçues par les populations dans les jours suivant l’accident nucléaire de Fukushima. « Les personnes qui étaient dans les zones très proches – entre 60 et 80 km autour de la centrale – sont susceptibles d’avoir reçu au total environ dix fois la limite réglementaire. Soit ce que l’on reçoit en réalisant un scanner », indique-t-il. Pour la population générale, « les enjeux se situent davantage sur la prise en charge psychologique des personnes car on sait qu’il peut y avoir des troubles psychologiques suite aux expositions. »
La plus grande interrogation concerne les enfants de Fukushima. Des mesures d’iodes 131 ont été menées par les autorités japonaises auprès d’un millier d’enfant peu après la catastrophe. « D’après les résultats, peu d’enfants ont été exposés et ce à des niveaux qui ne nécessitent pas d’intervention particulière. Mais il n’est pas sûr du tout que les services sanitaires aient ciblé les enfants qu’il fallait », souligne l’expert à l’IRSN. Les enfants de la préfecture de Fukushima vont toutefois bénéficier d’un suivi qui consiste en une surveillance régulière de la fonction thyroïdienne. « Le fait même que les Japonais mettent en place ce plan témoigne des doutes quant aux conséquences sanitaires chez ces enfants », commente Jean-René Jourdain.
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