INÉGALITÉS de santé, déficit de l’assurance-maladie, démographie médicale déclinante, vieillissements de la population… Les principaux candidats à l’élection présidentielle considèrent ces éléments comme les grands enjeux actuels du système de santé français. Dans ces conditions, plusieurs thèmes font consensus entre le Front de gauche, le parti socialiste, le MoDem, l’UMP et le Front National. C’est par exemple le cas de l’élargissement du numerus clausus, de la revalorisation des médecins pour faire face aux problèmes de désertification médicale et de l’accentuation de la prévention santé.
D’autres sujets, au contraire, restent très controversés. Les partis d’opposition critiquent -notamment- la politique de santé du gouvernement sortant. La loi HPST, votée en 2009, est particulièrement visée à travers la remise en cause de l’« hôpital entreprise » (par le PS), de l’autonomie des agences régionales de santé (par le FN) ; voire de leur existence même (par le Front de gauche). « Les opposants à l’UMP souhaiteraient -notamment- confier la gestion de l’hôpital et du système de santé local à des professionnels de santé, et non plus à des gestionnaires qui n’ont pas de compétences médicales. Ils pointent également du doigt la décentralisation du système de santé, mais n’apportent pas de solution de remplacement aux ARS », indique Thibaud Durand, responsable de mission Santé chez Alcimed*, auteur d’une analyse des programmes santé des principaux candidats à l’élection présidentielle.
Vivement critiquée également, la tarification à l’activité (T2A) devrait être réformée, voire supprimée. C’est du moins l’avis du PS et du Front de gauche qui considèrent la convergence tarifaire public/privé (conséquence de la T2A) comme un facteur réduisant -chaque jour davantage- l’accès aux soins gratuits et/ou pris en charge par la Sécurité Sociale.
Des mesures plus idéologiques que techniques.
Au-delà des propositions partagées ou critiquées, chaque parti développe un discours teinté de sa propre idéologie. Exemple frappant : la « préférence nationale » irrigue le programme santé du FN. En témoignent la proposition de suppression de l’aide médicale d’État ; la volonté d’instaurer un délai de carence d’un an de résidence sur le territoire national pour bénéficier de l’accès aux soins. Ou encore, de lutter contre la fraude à la Sécurité Sociale, notamment via la mise en place d’une carte Vitale biométrique, comprenant les empreintes digitales du détenteur. Une mesure qui devrait -par ailleurs- être mise en place par Nicolas Sarkozy, s’il est réélu. À l’extrême inverse, le Front de gauche prône -pour sa part- une vision humaniste de la santé, axée sur la réduction des inégalités socio-économiques. « Il en découle des propositions généreuses mais inapplicables telles que le remboursement à 100 % de l’ensemble des médicaments inscrits sur les listes de l’assurance-maladie », précise Thibaud Durand.
De son côté, l’EELV développe le thème de santé environnementale. Peu détaillé, son programme santé prône notamment la prévention et l’éducation thérapeutique dès le plus jeune âge, via une sensibilisation dans les établissements scolaires. Plutôt hostile aux industries de santé, le parti souhaite créer un institut national de recherche en santé environnementale et un institut de veille environnementale. La santé est également peu présente dans le programme du MoDem. Outre l’élargissement du numerus clausus et la sensibilisation des jeunes générations à la pratique médicale, le parti propose de développer davantage les maisons de santé et de créer un bouclier santé pour les personnes qui ne bénéficieraient plus de la couverture médicale universelle (CMU).
PS et UMP, conscients des problématiques du secteur.
« Seuls les programmes du PS et de l’UMP considèrent la santé comme un contributeur à la croissance économique et non uniquement comme un coût. Ces deux partis perçoivent ainsi la santé sous l’angle financier, sanitaire, socio-économique, mais aussi, industriel », souligne Vincent Genet, Directeur de la Business Unit Santé chez Alcimed. Outre l’accent mis sur la prévention (reconduction du Plan Alzheimer et du Plan cancer, notamment), le PS se démarque par sa volonté d’investir dans la recherche médicale et pharmaceutique, mais aussi, de rétablir l’équilibre les comptes de la Sécurité Sociale. Autre ambition du parti : celle d’encourager le maintien à domicile des personnes âgées. « Aujourd’hui, beaucoup de professionnels de santé gravitent autour du patient : infirmières libérales, prescripteurs hospitaliers, médecins généralistes et spécialistes. Le PS souhaiterait améliorer la coordination entre tous ces acteurs et revaloriser les médecins qui s’installent en zone rurale pour favoriser le maintien à domicile du patient », affirme Thibaut Durand.
De son côté, le programme santé de l’UMP mise, notamment, sur la valorisation des professionnels de santé. Le parti propose -par exemple- de diversifier davantage le mode de rémunération des médecins libéraux (paiement à l’acte, au forfait et rémunération de l’effort d’adéquation des soins aux bonnes pratiques) et de mettre en place des mécanismes d’intéressement pour les équipes hospitalières performantes et/ou travaillant en réseau. L’UMP souhaite également développer la télémédecine ; libérer du temps médical en simplifiant les tâches administratives des médecins. Et prévoit de soutenir les spécialités confrontées à un risque de pénurie. « Les propositions sur la santé de l’UMP sont, certes, plus détaillées et nombreuses que celles des autres partis. Mais, de façon générale, les programmes santé manquent de précision et d’ambition. Ils proposent une vision idéologique de la santé qui tend parfois à éluder certains problèmes essentiels. C’est particulièrement vrai concernant la question fondamentale du financement du système de santé : aucun candidat ne prend clairement position sur cette question », conclut Vincent Genet.
D’après une conférence de presse de Alcimed.
*Alcimed est une société de conseil et d’aide à la décision spécialisée notamment dans les sciences de la vie. Elle accompagne les décideurs et les entreprises dans leurs choix de positionnement et leurs actions de développement.
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