Le camp de réfugiés de Paris incluera un pôle santé confié à Médecin du Monde et au Samu social de Paris

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Publié le 06/09/2016
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Crédit photo : AFP

Le camp de réfugiés de Paris, dont les contours ont été présentés à la presse ce 6 septembre, et qui sera ouvert dans le 18e arrondissement de la capitale mi-octobre, intégrera un pôle santé.

Le camp de réfugiés se veut un lieu d'accueil, d'orientation, et d'information pour les primo-arrivants. Au nord de Paris, sur le site Dubois (un terrain de 2 hectares appartenant en partie à la ville jusqu'au 1er janvier 2018 et à la SNCF), les migrants seront d'abord accueillis de manière inconditionnelle par des professionnels de l'association Emmaüs Solidarité et informés de leurs droits, dans une grande bulle de 1 000 m2. Chacun devrait avoir une évaluation administrative et sociale de sa situation, notamment à l'égard du droit d'asile avant d'être dirigé vers des centres pour demandeur d'asile (CADA), le cas échéant, vers d'autres dispositifs comme le service intégré d'accueil et d'orientation via le 115, ou encore le dispositif pour les mineurs isolés étrangers (MIE) de la Croix-Rouge.

Le pôle santé, sis juste derrière cette grande bulle, proposera un bilan médical et une aide psychologique. Si Emmaüs Solidarité reste gestionnaire du dispositif global camp, l'aspect sanitaire sera traité en partenariat avec Médecins du Monde et le Samu social de Paris, a indiqué Bruno Morel, directeur général d'Emmaüs Solidarité. Les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) seront aussi partie prenante « pour les aspects juridiques », a-t-il précisé. « L'aspect santé est prépondérant », souligne-t-il.

Populations vulnérables dans un second centre, à Ivry

Les hommes seuls pourront trouver sous une grande halle comprenant 400 places (et 600 places fin 2016) un abri temporaire, pendant 5 à 10 jours, le temps que l'État leur propose une solution adaptée. Les femmes, familles, enfants, mineurs isolés, en un mot les populations vulnérables, seront accueillies dans un second centre de 350 places à Ivry-sur-Seine dans l'ancienne usine des eaux, qui devrait ouvrir « d'ici à la fin de l'année », a dit la maire de Paris, Anne Hidalgo. Un pôle transport assurera les navettes entre les deux sites.

« La vocation de ces centres est la mise à l'abri temporaire des personnes en attendant qu'elles soient orientées », a déclaré Anne Hidalgo. Et d'évoquer un « changement de méthode » par rapport à la situation depuis deux ans : l'installation de campements de fortunes qui deviennent insalubres et indignes, puis sont évacués lorsque la situation devient intenable. « Il est plus simple de prendre en charge au fil de l'eau les réfugiés plutôt que d'attendre que 2 500 personnes s'entassent dans des campements », a-t-elle estimé. L'Ile-de-France compte depuis juin 2015 15 700 personnes mises à l'abri dans le cadre de 27 opérations d'évacuation, dont 11 000 sont prises en charge dans des structures d'hébergement ; la région concentre 40 % des demandes d'asile déposées sur le territoire national.

Les structures mises en place au nord et au sud de Paris, conçues par l'architecte Julien Beller pour être modulables et transportables, ne sont pas destinées à être pérennisés, puisque le 18e arrondissement doit accueillir le futur campus universitaire Condorcet, et les usines des eaux doivent participer au projet « Réinventer la Seine ». Le défi reste l'accueil des réfugiés en aval. La ministre du Logement, Emmanuelle Cosse, a affirmé le principe d'une « politique publique responsable structurée et durable », qui repose sur un réseau de centre d'accueil et d'orientation (CAO) sur le tout le territoire. « Ce dispositif sera complété par une politique nationale de centres d'accueil ; aujourd'hui, il en existe 161 dans toute la France répartis dans 76 départements. Toutes les personnes qui passeront par ce sas seront réparties sur tout le territoire », a promis Emmanuelle Cosse.

Signe du soutien de l'État, le dispositif de Paris fait l'objet d'un protocole d'accord : la ville prend en charge 80 % du budget d'investissement (soit 5,2 millions sur 6,5 millions d'euros) et 50 % du coût de fonctionnement du pôle accueil de jour, soit 1,2 million d'euros par an. L'État investira au moins 15 millions d'euros en année pleine pour l'hébergement et la moitié du centre d'orientation. L'OFII devrait aussi apporter jusqu'à 500 millions d'euros par an, selon son directeur Didier Leschi.

Un dispositif innovant à répliquer sur tout le territoire, selon le Dr Sivignon

« C'est un dispositif innovant qu'il faudrait répéter sur l'ensemble du territoire car les structures d'accueil sont saturées et la gestion des flux des arrivées, une centaine par jour, est un vrai challenge » a réagi auprès du « Quotidien » la présidente de Médecins du Monde, le Dr Françoise Sivignon. « Il faut que l'État s'engage, et que la solidarité soit partagée », poursuit-elle. L'ONG devrait assurer une veille sanitaire dans le cadre d'un premier accueil et un appui psychologique. « Cela va aussi nous servir à enrichir notre plaidoyer sur les questions migratoires », précise le Dr Sivignon. L'articulation de ce sas par rapport à Calais et le devenir des 800 MIE dans le nord fait partie des questions pendantes.


Source : lequotidiendumedecin.fr