Lorsque le Bhoutan adopte son premier plan de développement quinquennal en 1961, le petit royaume himalayen compte en tout et pour tout deux médecins. « Il n’était pas rare que des villages entiers soient décimés par des épidémies. L’espérance de vie ne dépassait pas 38 ans », écrit Thierry Mathou dans Le Bhoutan, royaume du Bonheur national brut.
L’espérance de vie est aujourd’hui de 67 ans. La couverture vaccinale contre les principales maladies est quasiment universelle. Le taux de mortalité infantile est passé sous les 40 pour 1000. En 50 ans, une trentaine d’hôpitaux et des centaines de dispensaires ont ouvert à travers le pays, mettant plus de 90 % de la population à moins de 3h de marche d’un centre de soins.
Gratuité des soins
« Mais le chemin est encore long », résume le ministre de la Santé. Le pays consacre l’équivalent de 4,5 % de son PIB à la santé. La gratuité de l’accès aux soins est inscrite dans la Constitution. Consultations, hospitalisations, analyses et médicaments : les patients bhoutanais ne déboursent pas un ngultrum. Même lorsque les soins dont ils ont besoin ne sont pas disponibles dans le petit pays de 730 000 habitants.
« Nous ne pouvons pas traiter les cancers, les transplantations et les opérations cardiothoraciques », explique Dr Gosar Pemba, aujourd’hui médecin-chef de l’Hôpital national de Thimphu, la capitale du Bhoutan, après y avoir exercé l’anesthésie pendant 13 ans. Dans ces cas-là, les patients sont envoyés se faire soigner en Inde sur décision d’un comité de médecins. « Si le comité donne son accord, tous les frais sont pris en charge par l’Etat », explique-t-il. Cela concerne entre 1 000 et 2 000 patients chaque année.
« Pour la cardiologie, cela ne nous gêne pas d’envoyer quelques patients à l’étranger, ce serait de toute façon plus cher d’installer une unité ici. Pour le moment, ce n’est donc pas une priorité, commente Dr Pemba. Mais on aimerait installer un centre de cancérologie, en partenariat public-privé avec un partenaire australien. Le projet est en cours. Nous envoyons chaque année plus de 300 patients pour des cancers en Inde. »
L’Hôpital national de Thimphu est l’hôpital de référence du pays. En plus de soigner les 100 000 habitants de la capitale bhoutanaise, il reçoit des patients de tout le pays nécessitant des consultations et des hospitalisations spécialisées. Quelque 83 médecins y travaillent.
Les 350 lits de l’hôpital ont accueilli 13 000 patients en 2013. Ils étaient 18 000 à être hospitalisés l’année suivante. La croissance est exponentielle.
Mortalité maternelle
Même constat du côté de la maternité : « il y a environ 4 000 naissances par an à l’hôpital, mais c’est un chiffre en constante augmentation. La politique du gouvernement est que toutes les naissances aient lieu en établissement hospitalier », explique Dr Pemba. D’après le Programme des Nations Unies pour le Développement, la mortalité maternelle devrait passer sous la barre des 140 décès pour 100 000 naissances en 2015 au Bhoutan, qui est un Objectif de Développement du Millénaire.
L’ouverture d’un hôpital spécialisé « mère et enfant » est prévu pour les années à venir. Pour Lhab Dorji, directeur de l’Hôpital national de Thimphu, « nous sommes en train d’étirer les capacités de cet hôpital au-delà de ses moyens. Nous manquons de docteurs, d’infirmiers ». Mais « c’est un beau défi à relever », note cet administrateur qui vient d’être nommé à la direction de l’hôpital.
À défaut de pouvoir former des médecins dans le pays, l’État bhoutanais envoie chaque année 25 de ses meilleurs bacheliers faire des études de médecine à l’étranger, au Sri Lanka, au Bangladesh, en Inde, en Thaïlande, avec des bourses gouvernementales.
Depuis deux ans, pour désengorger les consultations externes de l’Hôpital national de Thimphu, des consultations payantes ont été mises en place en fin d’après-midi. Les patients peuvent y consulter les praticiens de leur choix, sans file d’attente. L’opération rencontre un franc succès auprès de la population aisée prête à débourser les 500 ngultrums (8 euros) exigés.
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