Au Bhoutan, le taux de suicide est passé en quatre ans de 8 à 13 cas pour 100 000 habitants, dépassant la moyenne mondiale (11,4 / 100 000). Le nombre de suicides reportés est passé de 57 cas à 96 en 2013. La hausse a de quoi alarmer les autorités du petit pays, qui s’est paradoxalement fait connaître à l’international pour son bonheur national brut.
« C’est un grand problème, surtout pour un pays qui aspire à être le pays du bonheur, il y a beaucoup d’inquiétude », reconnaît le Dr Nirola, chef du service de psychiatrie à l’hôpital national.
« En 2013, seulement quelques semaines après l’arrivée au pouvoir du nouveau gouvernement, un enfant de 11 ans s’est pendu. Cela a obligé le gouvernement à agir », raconte le psychiatre.
Une enquête de terrain a été effectuée pour essayer de cerner les causes possibles de cette inquiétante série de suicides. Mais pour le Dr Nirola, « beaucoup d’incertitudes et de zones d’ombre demeurent. Tous les cas de suicides ne sont certainement pas reportés ».
L’étude montre que 28 % des suicides concernaient des jeunes de 15 à 25 ans. Si 45 % des victimes étaient des agriculteurs, 58 % souffraient d’une dépendance à l’alcool. « Dans notre étude, nous avons trouvé que 80 % des personnes s’étant suicidées avaient montré des signes de détresse psychique, mais seulement 20 % étaient allées chercher des soins. Il y a beaucoup de somatisation et des troubles dissociatifs », décrit Dr Nirola.
Pénurie de psychiatre
L’homme de 54 ans est le seul psychiatre bhoutanais actuellement en poste dans le civil dans le pays. Un collègue récemment diplômé vient de rejoindre les forces armées. Trois psychiatres étrangers – un de Birmanie et deux de Cuba – travaillent également dans le pays mais sont confrontés à des problèmes de communication avec leurs patients. Des volontaires étrangers viennent de manière aléatoire compléter le tableau pour des périodes de quelques mois.
Le service de psychiatrie de l’hôpital national de Thimphu a ouvert en 2004 dans un ancien foyer d’étudiants. Il compte aujourd’hui 8 lits en psychiatrie et 10 lits pour les cures de désintoxication à l’alcool et aux drogues.
En 2014-2015, le gouvernement avait attribué 2 millions de ngultrums (30 000 euros) à la santé mentale. Un budget deux fois supérieur à celui de l’année fiscale précédente, mais qui reste dérisoire. Avec les donations, le budget annuel total pour la santé mentale avoisinerait les 5 millions de nulgtrums (75 000 euros), note la journaliste bhoutanaise Namgay Zam dans un article consacré aux suicides dans le journal « The Bhutanese ».
Un programme national de prévention des suicides va être lancé dans les mois à venir. Il prévoit entre autre la mise en place d’une ligne téléphonique, de formations et une meilleure collecte de données sur le sujet. « Au moins cela va sensibiliser la population, même si cela ne diminue pas le nombre de suicides. Cela fera savoir que la détresse peut être traitée, qu’il y a des endroits où aller, il faut bien commencer quelque part », commente Dr Nirola.
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