« Comment soigner les populations rurales éloignées des villes », tel est le défi que se proposent de relever le Pr Klotz, président de l'association Le Kaïcedrat, implantée au Sénégal Oriental, et le psychiatre Patrick Dewavrin, qui a créé en 2000 la Fondation « Pour une maternité sans risque ».
Au Sénégal, les objectifs du millénaire pour le développement n'étaient pas atteints en 2015 : la maternité infantile est de 55 ‰, alors qu'elle aurait dû descendre à 31 ‰. La mortalité maternelle stagne à 315 pour 100 000 naissances, alors que la cible visée était de 200 pour 100 000. Ces mauvais indicateurs atteignent leur paroxysme dans certains villages reculés, où l'analphabétisme se conjugue avec la pauvreté, où nombre d'enfants échappent à l'état civil, où l'assainissement fait défaut. « Le quadrillage du système de santé de nombre de pays d'Afrique Noire ne permet pas de satisfaire les besoins élémentaires de la population en matière de médecine préventive et curative », résument les auteurs en introduction.
Leur remède : la création d'équipes médicales légères, mobiles, qui permettent de « projeter la médecine préventive et curative au bout de la piste ». Le concept n'est pas nouveau et a notamment été éprouvé lors de la lutte contre la trypanosomiase, au début du XXe siècle, par le médecin militaire Eugène Jamot. Sa devise : « aller partout, visiter toute la population, extirper le mal à sa racine en dépistant et en soignant tous les trypanosomés existants ».
Un chauffeur, un professionnel de santé, des relais communautaires
Un siècle plus tard, constatant que les postes avancés ne suffisent pas, le Pr Klotz et le Dr Dewavrin dépoussièrent le modèle en misant sur l'efficacité, la pérennité et la simplicité des moyens. Ils décrivent par le menu le fonctionnement de l'équipe, qui se compose d'un chauffeur, et d'un seul professionnel de santé, infirmier ou sage-femme. Sa mission est double : soigner puis faire de l'éducation sanitaire. « Les soins sont un préalable indispensable à l'efficacité de l'éducation sanitaire », soulignent les auteurs, qui mettent en garde contre une parole étrangère qui viendrait imposer des messages sanitaires à une population. Ils insistent aussi sur la régularité des actions de prévention, qui doivent faire l'objet de « causeries », prenant appui sur des sujets du quotidien.
Élément clef de la réussite, des relais communautaires, idéalement un binôme homme - femme, doivent être mis en place dans chaque village. Cooptés par leurs pairs, formés et rémunérés, ils sont responsables des cases de santé, où est accueillie l'équipe mobile.
Les auteurs insistent sur les aspects médico-économiques du modèle, qui demande, pour l'investissement, 25 000 euros et le fonctionnement, 15 000 euros par an. Soit 3 euros par habitant et par an, calculent-ils, y voyant un argument choc pour répliquer ce modèle. Les points forts sont nombreux : adhésion des populations, meilleure surveillance des femmes enceintes et des enfants, meilleur dépistage des cas sociaux, de la malnutrition, augmentation de la couverture vaccinale et l'éducation sanitaire. Les faiblesses apparaissent lorsque les relais communautaires ont une formation trop rudimentaire, ou en cas de ruptures médicamenteuses.
* Quel espoir pour la santé rurale en Afrique, à propos d'un modèle développé au Sénégal Oriental, Francis Klotz, Patrick Dewavrin, éditions universitaires européennes.
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