BIEN QUE LE GOUVERNEMENT tout entier, à commencer par François Fillon, ait pris fait et cause pour le ministre de l’Intérieur, la réponse de M. Hortefeux n’est pas satisfaisante, ne serait-ce que parce que, dans le cadre d’un politiquement correct toujours plus exigeant, les Auvergnats ne méritent pas plus d’être dénigrés que d’autres. Pour autant, on comprend mal que l’ami de Nicolas Sarkozy ait choisi ce moment- pour plaisanter lourdement en présence d’un descendant d’immigré venu lui apporter son soutien. Si par hasard il est raciste, il n’a jamais été stupide. Il est vrai que, lorsqu’il était ministre de l’Identité nationale et qu’il luttait contre l’immigration clandestine, M. Hortefeux s’est acquis une réputation de « dur » dans les minorités. Il est vrai que Rachida Dati, qui demeure le symbole de l’intégration en France, a laissé entendre que M. Hortefeux est « un gros raciste ». Il est vrai qu’un violent différend l’a opposé tout récemment au préfet Girot de Langlade, lequel a été limogé sous le prétexte qu’il aurait prononcé des propos intolérants dans un aéroport. M. Girot de Langlade exulte : il estime avoir trouvé sa revanche.
« Pas offensé ».
La gauche, « consternée », vitupère un homme marqué à ses yeux par un « racisme bête et méchant ». Alors que le jeune militant UMP, Amine Benalia-Brouch, déclare : « Je ne me suis absolument pas senti offensé ». Il est pourtant le premier concerné ; et on éprouve un malaise quand une meute court après un homme politique en prétendant défendre quelqu’un qui ne se croit même pas victime. Il nous semble qu’il existe assez de cas de racisme sémantique ou physique pour qu’on les combatte en priorité sans perdre son temps à mettre en exergue une affaire qui n’est pas claire du tout. Mais bien sûr, personne n’est innocent. Si l’opposition peut discréditer un homme de la majorité au pouvoir, c’est tout bénéfice pour elle. Elle fait donc feu de tout bois, en utilisant parfois un carburant affreusement polluant. Tous ceux qui subissent le racisme au quotidien devraient s’indigner d’être instrumentalisés de la sorte.
Mais il y a plus grave. Non seulement la banalisation du mot racisme et l’extension de son sens à des propos éventuellement innocents aboutissent à une déculpabilisation des racistes, mais le pouvoir délateur de la video et d’Internet sont devenus de redoutables armes susceptibles d’altérer le fonctionnement de la démocratie. On n’approuvera même pas les déclarations badines et les plaisanteries de type ethnique : nous somes de ceux qui pensent que ce n’est pas drôle du tout et que c’est dangereux. Une des thèses en cours est que M. Hortefeux visait les journalistes ou les cameramen. Elle éclairerait ses propos d’une lumière infinment moins désagréable et parfaitement appropriée. Car il existe bel et bien un problème dans les rapports entre les personnages politiques et la consignation systématique de ce qu’ils disent ou font. La vidéo, diffusée par le site Internet du « Monde », est apparue aussitôt comme la traduction d’une vérité absolue à laquelle M. Hortefeux ne pouvait pas échapper, à laquelle il ne pouvait apporter aucune correction, aucun démenti. Dès lors que la video le disait, toutes ses dénégations ne pouvaient être que des mensonges.
Et le contexte, alors ? On n’entend ni le mot Arabe, ni le mot immigré dans le film qui a été diffusé et dont rien ne prouve qu’il n’a pas été « édité ». Cette vidéo ne correspond à rien sur le plan journalistique et rien en tant que contribution à l’histoire. Elle enregistre des propos qui pouvaient concerner les broccoli. C’est exactement comme si l’on condamnait un homme au terme de son procès sans avoir apporté la moindre preuve de sa culpabilité.
Non seulement hommes et femmes politiques doivent se garder de toutes sortes de dangers venus de tous les azimuts (on a photographié Angela Merkel en train de se changer sur une plage, est-ce que cela n’est pas insupportable du point de vue éthique et du respect de la personne ?), mais dans une époque ou on peut filmer avec un simple téléphone cellulaire, on viole systématiquement la vie privée des gens. Lesquels, s’ils appartiennent à une élite politique ou intellectuelle, n’en ont pas moins droit à un minimum d’intimité. L’affaire Hortefeux rappelle celle du journaliste Alain Duhamel qui a perdu une collaboration parce que, dans un séminaire à Sciences Po, il était filmé clandestinement au moment où il laissait entendre qu’il était favorable à François Bayrou, ce qui, aux yeux de son employeur, lui faisait perdre toute crédibilité en tant qu’éditorialiste politique. Comme si un éditorialiste ne pouvait avoir ses propres convictions et ne devait en aucun cas les laisser transparaître.
On laissera M. Hortefeux se débattre dans la mauvaise querelle qui lui est faite. Il est assez fort pour se défendre. En revanche, on ne passera pas sous silence des méthodes journalistiques qui font bon marché de la règle du recoupement et de la vérification des informations dont le journaliste dispose. Les animateurs du site du « Monde », curieusement, n’ont pas subi le sort de M. Duhamel. Ce qui prouve qu’il peut y avoir deux poids et deux mesures et, surtout, que la haine, la délation, le calcul politique pervers comptent infiniment plus que la morale professionnelle.
POURCHASSER LE RACISME, CERTES. MAIS PAS EN LE RELATIVISANT PAR DES AFFAIRES PEU CONVAINCANTES
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