Pas moins de 17 syndicats et collectifs d'infirmiers, et trois centrales de personnels de la fonction publique (CGT, FO et SUD), appellent à manifester ce mardi 8 novembre à Paris et dans les principales villes de France pour dénoncer « la dégradation des conditions de travail, d'études et de rémunérations » ainsi que les économies sur la santé.
Cet appel à la mobilisation d'hospitaliers, de libéraux et d'étudiants peut-il, s'il est fortement suivi, créer des perturbations à l'hôpital ? « Le fonctionnement même de l'hôpital fait qu'il est difficile de chiffrer en amont le nombre de participants à la grève », a expliqué ce lundi à la presse Nathalie Depoire, présidente de la Coordination nationale infirmière (CNI). Merlin Descours, secrétaire général de la Fédération nationale des étudiant(e)s en soins infirmiers (FNESI), est tout aussi prudent, il souligne que les jeunes sont « majoritairement mobilisés » mais craignent de s'engager dans un mouvement qui pourrait se traduire par des « représailles sur leurs stages ».
Infirmiers anesthésistes et de bloc remontés
« Dans mon service, toutes les infirmières de bloc opératoire (IBODE) et spécialisées en anesthésie (IADE) seront en grève, témoigne Brigitte Ludwig, présidente de l'UNAIBODE et cadre supérieure au centre hospitalier de Colmar. Au bloc, nous manquons de professionnels formés autrement que sur le terrain, à la va-vite. Les IADE ont obtenu le grade master il y a 18 mois et depuis, nous n'avons reçu plus aucun signe de reconnaissance. »
Si le ras-le-bol est ancien (grille salariale, pénibilité, conditions de travail qui se dégradent, déconsidération), l'exaspération des professionnels trouve sa source dans la récente vague de suicides de six infirmiers et un aide-soignant. La communauté infirmière a reproché à Marisol Touraine sa réaction beaucoup trop tardive.
Annoncé à la rentrée, un plan d'action pour l’amélioration de la qualité de vie au travail des soignants – visant notamment à mieux prévenir les risques psychosociaux (RPS) des personnels hospitaliers – se fait toujours attendre, alimentant le sentiment de déconsidération des blouses blanches.
Un cortège renforcé par les personnels hospitaliers
Dans ce contexte, trois syndicats de personnels hospitaliers ont appelé à la grève nationale le même jour. Pariant déjà sur une manifestation « de grande ampleur », la CGT, FO et SUD ciblent notamment la mise en place « à marche forcée » des 135 groupements hospitaliers de territoire (GHT), synonyme à leurs yeux de fusions « sauvages » entre établissements et de la suppression de 16 000 lits et 22 000 postes à l'horizon 2017 – des chiffres démentis par le gouvernement.
Des actions (rassemblement, manifestation, sit-in devant les agences régionales de santé, les caisses primaires d'assurance-maladie ou les hôpitaux) sont prévues à Nice, Marseille, Périgueux, Toulouse, Montpellier, Saint-Étienne, Strasbourg et une dizaine d'autres grandes ou moyenne villes de France, plus ou moins coordonnées avec le mouvement infirmier.
Dans la capitale, infirmiers et personnels hospitaliers partiront à 10 h 30 de la gare Montparnasse en direction du ministère de la Santé. Les agents de l'Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP), qui n'ont toujours pas digéré la réforme du temps de travail, devraient particulièrement donner de la voix.
Si le parcours de la manifestation est similaire entre infirmiers et personnels, les grévistes fouleront malgré tout le pavé sous deux bannières séparées. Contrairement aux syndicats de personnels, les représentants d'infirmiers n'étaient pas encore sûrs lundi midi d'être reçus.
Maltraitance faite à l'ensemble des professionnels de santé
Signe d'un malaise dépassant le seul cadre infirmier, le « soutien » de plusieurs syndicats de médecins à la rébellion du 8 novembre accroît la pression sur le ministère de la Santé, et ce en pleine négociation avec les centrales syndicales hospitalières sur l'attractivité des carrières.
Sans appeler à déposer les stéthoscopes, Avenir Hospitalier dénonce « la maltraitance faite aux professions infirmières et au-delà, à l'ensemble des professionnels de santé ». « L'hôpital va mal. Impossible pour les médecins d'ignorer les conditions de travail des infirmiers, pas plus heureux que nous », souligne le Dr Yves Rébufat, secrétaire général de la centrale pour expliquer son « association » au mouvement de grogne. Concernés au premier chef par la violence ordinaire et la pénurie médicale, les urgentistes de l'AMUF sont sur la même ligne.
Mobilisée contre le « massacre organisé de notre système de santé », l'Union française pour une médecine libre (UFML) invite déjà les professionnels de santé à « poursuivre le mouvement » le jeudi 24 novembre, date de son propre appel à la grève.
Pas en reste, les comités de défense des hôpitaux et maternités de proximité ont relayé l'appel à la mobilisation. Leur ancrage dans les territoires pourrait contribuer au succès du mouvement.
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