Moins de 24 heures après l'annonce par le Premier ministre d'un report de trois semaines de l'ouverture des cinémas, musées, et théâtres (initialement prévu le 15 décembre) et du remplacement du déconfinement par un couvre-feu de 20 heures à 6 heures, les épidémiologistes de Santé publique France sont revenus sur les chiffres inquiétants de l'épidémie qui a incité le gouvernement à prendre ces mesures de mitigation de l'épidémie.
Selon le responsable de l’unité des infections respiratoires de Santé publique France, le Dr Daniel Lévy-Bruhl, ce n'est pas l'ouverture des commerces non essentiels, le 28 novembre dernier qui est à l'origine de l'arrêt de la diminution de chiffres de l'épidémie ou, en tout cas, « il est encore trop tôt pour le dire », a-t-il expliqué lors d'une entrevue avec des journalistes.
Selon l'épidémiologiste Patrick Rolland, « le facteur numéro n° 1 de la situation actuelle est le relâchement des mesures barrières individuelles et collectives », bien que cette hypothèse « soit très difficile à objectiver », complète le Dr Lévy Bruhl. Et d'ajouter : « On peut aussi citer les facteurs climatiques. On a de bonnes raisons de penser qu'il y a une synchronicité entre l'arrivée du froid et l'augmentation du nombre de cas. Cela a été observé dans de nombreux pays qui ont pourtant des politiques de gestion de l'épidémie très différentes. »
Le couvre-feu, une mesure efficace
Si les membres de Santé publique France ne se prononcent pas sur l'éventuelle efficacité des mesures annoncées jeudi soir par Jean Castex, ils insistent sur les données en faveur de la pertinence du couvre-feu. « Nous avons réalisé des travaux sur l'impact des couvre-feux dans les métropoles qui les ont mis en place avant le confinement généralisé, explique Patrick Rolland, épidémiologiste à Santé publique France. Il en ressort que le ralentissement de circulation du virus dès la fin octobre dans ces villes a eu lieu indépendamment de la mise en place du confinement. » Les épidémiologistes de Santé publique France n'excluent pas que l'annonce des mesures de confinement et du couvre-feu ait pu avoir un effet sur les comportements entrant en synergie avec les effets directs de ces mesures.
3e vague en vue ?
L’évolution de l’épidémie observée en semaine 49 (du 30 novembre au 6 décembre 2020) suggère un risque élevé de reprise de la circulation du virus SARS-CoV-2 dans les prochaines semaines en France. Ce constat appelle à la plus grande vigilance, notamment dans le contexte des fêtes de fin d’année. Aujourd’hui encore, l’adoption par tous des mesures de prévention individuelle dans la sphère privée associée aux mesures collectives reste le seul moyen pour limiter la circulation du virus et contenir l’épidémie.
Dans son dernier point épidémiologique publié jeudi 10 décembre, Santé publique France confirme un « plateau » en semaine 49 après 4 semaines de diminution. Le nombre de nouveaux cas confirmés par tests RT-PCR et antigéniques est estimé à 72 121 contre 76 500 la semaine précédente, soit une baisse de 6 % seulement.
Nouvelle méthode pour le taux de positivité
Le taux de positivité des tests est désormais calculé selon une nouvelle méthode par test et non plus par patient. Concrètement : une même personne testée négativement plusieurs fois à quelques jours ou semaines d'intervalle n'était comptabilisée qu'une fois selon l'ancien calcul, et plusieurs fois selon le nouveau. Cette nouvelle méthode diminue logiquement le taux de positivité, mais les statisticiens de Santé publique France ont appliqué rétroactivement le nouveau mode de calcul aux données des semaines passées. Cela leur permet de constater que la tendance à la stabilisation persiste : 6,4 % de tests positifs en semaine 49 contre 6,5 % en semaine 48.
Les nouvelles hospitalisations, connues pour avoir un temps de retard sur les nouvelles contaminations, poursuivent une baisse, bien que plus modeste qu'auparavant : 8 424 en semaine 49 contre 9 247 en semaine 48, de même que les admissions en réanimation (1 127 en semaine 49 contre 1 346 en semaine 48).
Chaînes de contamination difficiles à tracer
La mortalité liée à la Covid-19 a, quant à elle, baissé de 19,2 % en une semaine, mais reste au niveau de 2 589 nouveaux décès en une semaine. Ce dernier chiffre est provisoire, compte tenu du délai de consolidation des données.
Face à ces chiffres, Christine Campese, épidémiologiste à Santé publique France, retient surtout le caractère préoccupant de la dynamique de l'épidémie n'est pas rassurante : « le taux de reproduction effectif est en hausse par rapport à ce qu'on voit la semaine dernière. Il y a un risque d'augmentation de la circulation du virus », prévient-elle.
Christine Campese insiste sur le fait que moins de 10 % des cas sont désormais liés à des clusters identifiés contre 20 % au cours de l'été, ce qui signifie que la majorité des chaînes de contaminations échappent à la surveillance et au traçage. Une étude à venir de l'Institut Pasteur devrait fournir une analyse très fine des lieux de contamination des Français.
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