Dans un rapport publié mardi, l'association Médecins du Monde (MdM) alerte sur la persistance d'un accès aux soins « inéquitable pour les personnes confrontées à de multiples facteurs de vulnérabilité », les migrants en particulier. Ce constat se fonde sur les données médicales et sociales collectées en 2015 dans les centres gérés par l'ONG et ses partenaires auprès d'un peu plus de 10 000 personnes vues dans 11 pays d'Europe (Allemagne, Belgique, Espagne, France, Grèce, Luxembourg, Pays-Bas, Norvège, Royaume-Uni, Suède, Suisse) et en Turquie. Parmi ces personnes, 94,2 % sont des ressortissants étrangers, dont 69,5 % proviennent de pays extérieurs à l'Union européenne.
Pas de couverture santé pour 68 % des personnes vues en consultation
Le constat, en termes d'accès aux soins, est particulièrement inquiétant, puisque 68 % des personnes rencontrées n'avaient pas de couverture santé à leur arrivée dans les centres gérés par MdM ou ses partenaires, 21,5 % avaient dû renoncer à des soins ou des traitements dans les douze mois précédents et 9,2 % s'étaient vu refuser des soins dans une structure de santé. Plus de 40 % des femmes enceintes n'avaient pas eu accès à des soins prénataux avant leur visite dans un centre MdM ou d'un partenaire, et 54 % des enfants n'étaient pas vaccinés contre la rougeole, les oreillons et la rubéole, 32 % contre le tétanos.
« Lorsque les gens arrivent dans nos centres ou ceux de nos partenaires, ils n’ont pas de couverture sociale et n’ont pas d’information sur une couverture sociale pour laquelle, dans la grande majorité, ils ont pourtant un accès légal », souligne le Dr Françoise Sivignon, présidente de l'association. « En conséquence, la plupart des problèmes de santé n'avaient pas été traités correctement avant l'arrivée des patients au centre de santé », rapporte l'association. Quant à ceux qui sont sans autorisation de séjour (39,6 %), ils limitent leurs déplacements de peur d'être arrêtés. « L'accès aux soins est donc limité et ils viennent consulter chez nous », fait remarquer le Dr Sivignon.
Violences institutionnelles, sexuelles et psychologiques
L'ONG fait également un focus sur la violence subie par les migrants dans leur pays d'origine, au cours de leur parcours migratoire et dans le pays « d'accueil », et sur les traumatismes et troubles psychologiques qui en découlent. Alors que 18 % des personnes interrogées ont signalé avoir été confrontées à une violence institutionnelle (forces armées ou police), 15 % à des violences sexuelles et 26 % à des violences psychologiques (dans les pays d'accueil, notamment), MdM note une « absence de soutien en santé mentale dans les pays "d'accueil" ». De ce fait, « face à des besoins croissants, le volet de réponse à la santé mentale a été fortement développé par MdM, cette année », rapporte le Dr Sivignon.
Le mythe du migrant profiteur du système de soins
Enfin, le mythe des migrants qui viennent en Europe pour se faire soigner est fortement dénoncé par l'association : non seulement il « ne correspond pas à la réalité des personnes » que l'association a rencontrées, mais il « devrait être supprimé des discours politiques », soutien l'ONG. « Parmi les raisons de migration citées, seulement 3 % des patients déclarent avoir quitté leur pays d'origine entre autres pour des raisons de santé », souligne le rapport.
L'association, qui note que l'année 2016 « a également vu le développement du plus grand mouvement de solidarité en Europe » vis-à-vis des migrants, conclut son rapport par ses mots empreints d'optimisme : « Il est satisfaisant d'agir tous ensemble. L'injustice n'est jamais évitable, insurmontable ou acceptable. »
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