Des villes fantômes, des personnes déplacées, des enfants souffrant de malnutrition : l'État de Borno, dans le nord-est du Nigeria, épicentre des violences entre le groupe jihadiste de Boko Haram et l'armée nigériane, est victime d'un « désastre sanitaire » sans précédent, alerte Médecins sans frontières (MSF).
Dans la capitale Maiduguri, les hôpitaux sont saturés sous la pression de l'arrivée de plus d'un million de personnes : six enfants malades de la rougeole ont été renvoyés dans le camp de déplacés d'où ils venaient début juillet, indique MSF, qui fait de l'augmentation de la capacité d'hospitalisation une de ses priorités.
Malnutrition et rougeole
La situation est autrement critique dans les enclaves en dehors de la capitale Maiduguri où vivent 500 000 personnes déplacées, en manque de nourriture, de soins médicaux, d'eau potable et d'abri.
Déjà en juin, une équipe MSF avait relevé des taux de malnutrition et de mortalité très élevée à Bama, la deuxième ville de l'Etat de Borno, à 70 km de Maiduguri, devenue aujourd'hui une ville fantôme. « Cette zone est coupée du monde depuis presque deux ans », témoigne le Dr Isabelle Defourny, directrice des opérations de MSF. Sa population, 10 000 personnes, vit regroupée dans l'ancien hôpital converti en camp et protégé par l'armée nigériane. « Malgré quelques distributions de nourriture et l'évacuation par les autorités de près de 1 500 personnes – parmi les plus vulnérables et malades – les taux de mortalité restent nettement supérieurs au seuil d'urgence et près de 20 % des enfants souffrent de malnutrition aiguë sévère » tandis que sévit une épidémie de rougeole, indique l'ONG. L'organisation vient de s'y installer pour une dizaine de jours, pour renforcer les soins médicaux et nutritionnels, améliorer l'accès à l'eau et les conditions d'hygiène dans le camp. Entre le 23 mai et le 20 juin, près de 200 personnes y sont décédées, rapporte MSF.
Missions exploratoires
MSF effectue aussi des missions exploratoires dans les territoires reculés, parfois avec escorte de l'armée. L'ONG prévoit de relancer les activités hospitalières et de prendre en charge les enfants souffrant de malnutrition à Monguno (150 000 habitants, dont 65 000 déplacés).
« Une aide massive est indispensable pour apporter des secours aux populations piégées dans les zones enclavées ou reculées. Car tout indique que la population d'autres villes comme Dikwa se trouve aussi dans une situation critique », indique le Dr Isabelle Defourny.
L'ONG lance un appel aux dons en urgence pour faire face à ces besoins exceptionnels, sur son site internet ou à l'adresse MSF - Fonds d'urgence, 75 011 Paris.
Un désastre d'une ampleur sous-estimée, selon l'UNICEF
Le Fonds des Nations unies pour l'enfance (UNICEF) avait aussi lancé un appel aux dons début 2016 pour porter assistance à ces populations. Il n'a reçu que 23 millions de dollars sur les 55,5 millions de dollars escomptés.
« Il y a deux millions de personnes que nous n'arrivons toujours pas à atteindre dans l'État de Borno, ce qui veut dire que l'ampleur réelle de la crise n'a toujours pas été révélée au monde », a déclaré Manuel Fontaine, directeur régional pour l'Afrique de l'Ouest et l'Afrique centrale de l'UNICEF.
Le 1er juillet, le Fonds prévenait que 250 000 enfants de moins de cinq ans allaient souffrir de malnutrition sévère extrême cette année dans l'Etat de Borno, dont 50 000 risquent d'en mourir.
Depuis 2009, les violences de Boko Haram ont causé la mort de 20 000 personnes et le déplacement de 2,6 millions de civils.
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