La santé en librairie
COMME UN ETHNOLOGUE découvrant une tribu inconnue, Jean-Claude Kaufmann est parti en voyage au cur de la toile, parcourant blogs, forums de discussion et sites de rencontres pour mieux explorer le paysage contemporain des rencontres amoureuses qu’est Internet et tenter de saisir la réalité, le sens voire les conséquences sur notre vie de ce nouvel univers. Poursuivant ainsi son parcours de recherche sur l’identité et les comportements amoureux contemporains (on se souvient de ses essais sur le sujet, « la Femme seule et le prince charmant », en 1999, ou « l’Étrange histoire de l’amour heureux », plus récent).
« L’univers des rencontres amoureuses s’est brusquement transformé, au tout début du troisième millénaire, écrit Jean-Claude Kaufmann. Une révolution liée à la fois à une affirmation nouvelle des femmes concernant la sexualité et à la banalisation d’Internet. » Des rencontres diverses et multiples, des choix presque infinis, des changements de partenaires rapides et sans justification, une sexualité ressemblant à un loisir comme un autre : bref, un zapping dans l’air du temps. Mais, derrière ce consumérisme et cette liberté apparente, se cachent en fait beaucoup de violence, de désillusions et de frustrations, explique l’auteur. Une fois passée la phase d’anonymat liée à la protection de l’écran, l’intrusion dans la vraie vie expose en effet à bien des déceptions voire des déconvenues.
Si la multiplicité du choix, la simplicité apparente de la rencontre semblent rendre les relations plus faciles, ce mode de connexion atteint vite ses limites. Le sentiment surgit là où on ne l’attendait pas ; tandis que la relation destinée à être fugace et purement sexuelle se complique. De plus, « l’idée qu’il puisse y avoir deux catégories très tranchées n’est qu’une illusion », écrit Jean-Claude Kaufmann. Contrairement à ce que cette réalité virtuelle veut bien en dire, la confusion sexe/amour est plus grande que jamais, le sexe ne parvient pas à devenir un loisir comme un autre et « le sexamour se définit au contraire par son ambiguïté permanente ».
« Prendre sans être pris, ce rêve consommateur des temps modernes » n’est qu’un leurre et un projet dont la stérilité apparaît un jour ou l’autre au cybercCasanova.
Paradoxalement, c’est désormais l’amour qui se pose en alternative radicale au mode de fonctionnement dominant et finit par être plus sulfureux que les expériences sexuelles les plus débridées. L’invention d’un monde à soi, d’une sorte d’ « utopie minuscule » source de plus grande satisfaction, sinon de bonheur, que ce consumérisme amoureux et sexuel chargé de cynisme et d’égoïsme, conclut le sociologue.
Fuir la solitude, c’est se fuir soi-même.
Nous sommes tous, à un moment ou à un autre, confrontés à la solitude : il en existe évidemment plusieurs variantes, plus ou moins choisies ou subies, plus ou moins objectivables, plus ou moins subjectives. La solitude sociale des timides est différente de la solitude affective, elle-même différente de la solitude intérieure où la confrontation à soi-même est douloureuse et inquiétante. Le sentiment de solitude renvoie à un sentiment de mal-être, de détresse plus ou moins intense et adapté à la réalité. Gérard Macqueron analyse les différentes composantes de ce sentiment et les moyens de lui donner du sens, de dépasser ce qui est une peur pour en faire un passage utile vers la connaissance de soi, dans une perspective très cognitivo-comportementale.
L’intolérance à la solitude a quelque chose à voir avec l’intolérance à la frustration et une dépendance affective excessive ; d’où l’intérêt de permettre aux enfants de faire cet apprentissage du manque. Par ailleurs, la solitude subie, du fait d’un isolement social lié à la peur d’aller vers les autres, à un manque de confiance en soi, est évidemment source de souffrance, accessible à une amélioration de l’estime de soi via des techniques cognitivo-comportementales, explique l’auteur. Comme peuvent l’être des difficultés de gestion de ses propres émotions.
Le psychiatre, auteur de précédents ouvrages sur l’anxiété sociale, explore cette « sensation désagréable dont nous souhaiterions pouvoir nous affranchir », véritable source de souffrance quand elle est vécue « comme un échec, un abandon, un ennui, et qu’elle n’est porteuse d’aucun sens », alors qu’il peut s’agir d’une expérience naturelle incontournable dont personne pourtant ne peut faire l’économie et qui peut être au contraire source de richesse, à condition de savoir aborder avec calme et sagesse cette « rencontre avec soi-même ».
Un thème rarement abordé de cette manière dans un monde où il s’agit principalement d’occuper le temps et d’être aussi actif que possible. À conseiller aux accros déçus de la cyberrencontre.
Jean-Claude Kaufmann, « Sex@mour », Armand Colin, 204 pages, 14,90 euros.
Gérard Macqueron, « Psychologie de la solitude », Éditions Odile Jacob, 300 pages, 21,90 euros.
Vers un plan Maladies rénales ? Le think tank UC2m met en avant le dépistage précoce
La prescription d’antibiotiques en ville se stabilise
Le Parlement adopte une loi sur le repérage des troubles du neurodéveloppement
Chirurgie : les protocoles de lutte contre l’antibiorésistance restent mal appliqués, regrette l’Académie