En 2016, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) avait fédéré 21 pays identifiés comme étant en mesure d'éliminer le paludisme d'ici 2020 dans le cadre de l'initiative E-2020. Selon le rapport publié ce mercredi 21 avril, seulement huit d'entre eux (Algérie, Belize, Cap-Vert, Chine, El Salvador, Iran, Malaisie et Paraguay) y sont parvenus.
En 2015, la stratégie globale de l'OMS contre le paludisme avait fixé des objectifs pour les 15 années suivantes : une réduction de 40 % de l'incidence et de la mortalité en 2020 (puis 75 % en 2025 et 90 % en 2030), par rapport aux chiffres de 2015, et une élimination de la transmission dans au moins 10 pays (20 en 2025 et 35 en 2030).
Pour le Dr Pedro Alonso, directeur du programme global d'élimination du paludisme de l'OMS, les choses sont en bonne voie : « environ la moitié des pays touchés par le paludisme sont passés sous la barre des 10 000 nouveaux cas par an, précise-t-il. C'est un seuil un peu arbitraire mais qui est représentatif de pays en passe d'éliminer la transmission. Il y a quelques semaines, le Salvador a reçu sa certification d'élimination du paludisme (délivrée au bout de trois années sans nouveau cas enregistré), alors qu'il est entouré de pays où l'épidémie est encore active. Même la Chine, qui avait près de 30 millions de nouveaux cas chaque année dans les années 1960 a réussi à stopper complètement la transmission », se réjouit-il.
Les efforts percutés par la pandémie de Covid-19
Comme beaucoup d'autres programmes de l'OMS, les efforts de lutte contre le paludisme ont été freinés par la pandémie de Covid-19 : un pays concerné sur trois affirme avoir connu des perturbations dans ses programmes de lutte contre le paludisme. « Les gouvernements ont dû réassigner des sommes normalement dédiées aux programmes de lutte anti-vectorielle ou à l'achat de traitements », peut-on lire dans le rapport E-2020.
L'impact de la crise sur la logistique internationale a également eu un effet délétère. Ainsi, le Bhoutan a dû retarder ses campagnes de distribution de moustiquaires, ce qui a provoqué un pic de contamination en 2020. Au Botswana, une augmentation brusque du nombre de cas à la mi-2020 serait liée à un exode vers les zones rurales par des populations qui ont anticipé les mesures de confinement à venir.
Dans le même temps, les cas importés de paludisme ont totalement disparu au Cap-Vert, à Belize et au Salvador et fortement régressé au Timor-Leste, en Eswatini (ex-Swaziland), en Malaisie, au Bhoutan, en Corée du Sud, en Chine, au Mexique et en Afrique du Sud.
« Nous n'avons pas encore une idée très précise de l'impact du Covid-19 sur l'épidémie de paludisme, estime le Dr Melanie Renshaw, spécialiste du paludisme auprès de l'Unicef. Mais les premières projections de l'OMS laissent envisager un possible doublement des nouveaux cas de paludisme en 2020 » comparé à l'année précédente. « Mais la bonne nouvelle, poursuit-elle, c'est qu'avec le soutien institutionnel, plus de 160 000 moustiquaires ont pu être distribuées, et un nombre record d'enfants a pu bénéficier d'une chimioprévention. Il est donc probable que l'on ait évité le pire des scénarios et la multiplication par 2 du nombre de cas redoutée par l'OMS ».
Selon l'agence onusienne, 24 pays de tous les continents ont officiellement éliminé le paludisme de leur territoire depuis 2000 et 25 autres sont en mesure d'atteindre l'objectif de n'avoir aucun cas de paludisme d'ici 2025. Ils ont été regroupés dans une nouvelle initiative : E-2025.
Le vaccin, une nouvelle arme en cours d'évaluation
En 2015, l'Agence européenne du médicament a approuvé la commercialisation de Mosquirix (RTS, S/A01), premier vaccin contre le paludisme. Cinq ans plus tard, 1,7 million de doses ont été administrées dans des programmes pilotes menés au Ghana, au Kenya et au Malawi. Le schéma vaccinal est assez complexe, puisqu'il implique l'injection de 4 doses avant les 2 ans de l'enfant vacciné. L'efficacité de ces campagnes de vaccination sera évaluée lors d'un comité spécial qui se réunira en octobre 2021 pour se prononcer sur leur possible élargissement.
« Nous savons que ce vaccin n'est pas parfait, explique le Dr Pedro Alonso. Mais le paludisme n'est pas une maladie aussi facile que le Covid-19 à traiter par un vaccin. Le Plasmodium est un véritable vaisseau spatial quand le SARS-CoV-2 est au mieux une bicyclette. C'est la raison pour laquelle on a mis au point 4 vaccins en moins d'un an contre le Covid et qu'il a fallu 30 ans et 4 milliards de dollars pour développer le RTS. Néanmoins, il constitue la première génération de vaccin et nous espérons que d'autres suivront. »
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