Un implant stimulant des zones précises du cortex sensoriel chez un tétraplégique de 27 ans a pu susciter des sensations tactiles comme si elles venaient de sa main. De plus, à travers l’interface cerveau-machine développée à l’université de Pittsburgh, il peut sentir le toucher d’une main robotisée qu’il contrôle par la pensée.
Des interfaces cerveau-machine ont été développées ces dernières années, et certaines permettent de contrôler par la pensée les mouvements d’une prothèse de main ou d’un bras robotisé. Toutefois, il manquait jusqu’ici le feed-back somatosensoriel.
« Pour saisir et manipuler avec dextérité les objets, il nous faut restaurer la sensation. Cette étude décrit le premier pas vers cet objectif en utilisant une interface cérébrale directe », explique au « Quotidien » le Pr Robert Gaunt, bio-ingénieur à l’université de Pittsburgh (États-Unis). Tout en cherchant le candidat approprié pour conduire cette étude, l’équipe a perfectionné le dispositif afin que les entrées du bras robotique soient transmises à travers un réseau de micro-électrodes implantées dans le cerveau, dans les zones où résident les neurones associés au mouvement et au toucher de la main.
Stimulation électrique
Au printemps dernier, Nathan Copeland, un tétraplégique de 27 ans, a été l’heureux candidat qui reçut l’implant cérébral. Dix ans auparavant, un accident de voiture avait lésé sa moelle épinière au niveau des vertèbres cervicales. Tétraplégique, il conservait néanmoins une motricité des épaules lui permettant de taper sur le clavier de son ordinateur même avec les mains paralysées.
Avant de recevoir l’implant, plusieurs examens d’imagerie avaient été réalisés afin d’identifier chez lui les zones cérébrales précises correspondant aux sensations de chacun de ses doigts et de sa paume.
« Nous voulions savoir si la stimulation électrique d’une zone cérébrale qui est normalement activée lorsque l’on touche des objets, peut générer des sensations chez une personne ayant une lésion médullaire haute. Puisque la main de cette personne est déconnectée du cerveau, nous voulions susciter une sensation comme si sa main était touchée », explique le Pr Gaunt.
Dans les premières semaines suivant l'opération, le jeune tétraplégique ne ressentait rien lors des tests de stimulation, effectués pendant 4 heures, 2 à 3 fois par semaine. Les 4 années d’effort consacrées au développement de l’interface allaient-elles aboutir à l’impasse ? L’anxiété de l’équipe grandissait.
Un jour cependant, environ un mois après l’implantation de la puce, Nathan Copeland commença à sentir comme si on lui touchait ses doigts. « Je peux sentir à peu près tous les doigts - c’est vraiment une sensation bizarre, expliqua-t-il. Parfois, c’est une sensation électrique, parfois une pression, mais la plupart du temps, je peux identifier précisément le doigt et je ressens comme si mes doigts étaient touchés ou poussés. »
Bras robotique
Dans un second temps, l’implant de Nathan a été relié à un bras robotique. Le jeune homme, les yeux bandés, devait identifier quel(s) doigt(s) de la main robotique était touché. La discrimination était plutôt bonne (85 % de bonne réponse lorsqu’un doigt était touché ; 53 % de bonne réponse lorsque 2 doigts étaient touchés), et notamment pour l’index et l’auriculaire.
« Le résultat le plus important, précise le Pr Andrew Schwartz, neuroscientifique a l’université de Pittsburgh, est que la microstimulation du cortex sensoriel peut susciter une sensation naturelle plutôt que des picotements. La stimulation est sans danger, et les sensations évoquées sont stables au fil des mois. Il reste encore du travail à accomplir, précise-t-il, pour mieux comprendre les modes de stimulation qui sont nécessaires pour aider les patients à mieux effectuer les mouvements. »
Plus de six mois après l’implantation des électrodes, Nathan continue de travailler avec l’équipe. « Il n’y a pas d’effets secondaires à ce jour et nous redoublons de vigilance pour minimiser le risque d’infection car un connecteur sur cet implant traverse la peau. Nous espérons que la future technologie éliminera ce risque avec des interfaces sans fil, confie le Pr Gaunt au “Quotidien”. Les tests actuellement réalisés avec notre participant combinent les sensations perçues aux mouvements du bras prothétique qu’il contrôle par la pensée. »
Le Pr Gaunt précise que « c'est la premiere fois qu’un tel dispositif a été implanté dans le cerveau d’une personne en vue de générer des sensations ». Le projet « n’aurait pas vu le jour sans le soutien important de la DARPA (Agence américaine du département de la défense pour les projets de recherche avancée) », souligne-t-il.
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