LE QUOTIDIEN - Comment appréciez-vous la baisse globale de l’aide au développement pour la santé ?
PHILIPPE DOUSTE-BLAZY - Nous estimons sa diminution à 10 % au niveau mondial. L’aide publique atteindra en 2012 125 milliards de dollars, il va nous manquer 40 milliards de dollars. C’est une catastrophe mondiale qui survient alors que, s’agissant du SIDA, seulement 28 % des enfants contaminés bénéficient à ce jour d’un traitement.
Faut-il s’étonner que la crise économique impacte la solidarité internationale ?
PHILIPPE DOUSTE-BLAZY - Il faut d’abord s’en inquiéter. Pour des raisons éthiques bien sûr, car on ne saurait accepter qu’un enfant meure toutes les trois secondes dans le monde des suites d’une maladie parfaitement curable. Mais aussi pour des raisons politiques : 1,5 milliard d’hommes vivent aujourd’hui sous le seuil d’extrême pauvreté, avec moins d’un dollar par jour, privés d’accès à l’eau potable, à l’assainissement, à la santé et à l’éducation ; leur souffrance risque d’être récupérée par un Ben Laden, un Hitler ou un Staline, qui se serviront de leur humiliation pour faire du XXIe siècle le théâtre d’une tragédie planétaire. Comme l’a dit le président Lula, c’est une vraie bombe atomique qui risque à tout moment d’exploser.
Que proposez-vous en termes de financement pour renverser la tendance ?
Nous ne pouvons plus rester à l’intérieur de nos vieilles architectures juridiques, il faut réagir avec des idées neuves et des produits innovants, comme nous avons commencé à le faire il y a six ans, en créant une source de revenus indolore et durable à partir de l’un des symboles de la mondialisation que sont les transports aériens (lire encadré). Or, nous vivons un moment crucial pour la France et pour le monde : les modalités d’application de la taxe sur les transactions financières décidée par Nicolas Sarkozy et dont le montant a été doublé par François Hollande vont être fixées. Le président a annoncé que 10 % des sommes collectées à partir du prélèvement effectué sur le montant des transactions boursières, sera affecté à l’aide au développement. Le saupoudrage qui consisterait à alimenter divers acteurs publics, parapublics et privés serait privé de tout effet d’entraînement et de réelle efficacité. Ces moyens nouveaux doivent absolument être concentrés sur un mécanisme mondial de solidarité.
C’est-à-dire ?
UNITAID, qui a apporté la preuve de son efficacité et dont le conseil d’administration réunit des décideurs internationaux, comme le président français, le Premier ministre britannique, ou Bill Gates, a vocation à devenir cet acteur multilatéral, quitte à ouvrir bien sûr le champ de ses interventions à de nouvelles problématiques médicales, comme les diarrhées, et à intervenir dans le domaine de l’éducation, de l’alimentation, ou dans d’autres grands sujets liés au développement.
Les arbitrages doivent être rendus prochainement par le président Hollande. C’est un moment de vérité. Il s’agit de savoir si la France est décidée à se comporter comme un leader de la mondialisation de la solidarité. De tous les dossiers de politique internationale, c’est certainement le plus important et le plus décisif à long terme.
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