Mieux comprendre l'impact psychotraumatique des attentats du 13 novembre 2015 à Paris et à Saint-Denis, et mettre en lumière le recours aux dispositifs de soins pour le cas échéant l'améliorer, tel est le double objectif de l'Enquête de santé publique post-attentats (ESPA), lancée par Santé publique France, avec l'université Paris XIII.
Ce travail épidémiologique fait écho à IMPACTS (investigation des manifestations traumatiques post attentats et de la prise en charge thérapeutique et de soutien), dont la première vague d'entretiens a été réalisée du 1er juin au 31 octobre 2015 auprès de 190 civils et 232 professionnels impliqués dans les attentats de janvier. Il s'articule en outre avec le programme de recherche « 13 novembre » conduit par le CNRS et l'INSERM qui, début juillet, avait inclus 500 volontaires - sur 1 000 nécessaires, selon les chercheurs.
Enquête en ligne
Toutes les personnes volontaires de plus de 16 ans peuvent répondre au questionnaire depuis le 7 juillet, et jusqu'au 1er octobre, en se rendant sur le site de Santé publique France. Sont concernés les civils directement exposés (visés ou menacés par les terroristes, ayant dû se cacher, témoins directs), les personnes endeuillées, et les professionnels (secours, forces de l'ordre, associations, services des villes et de soins). « Nous estimons que plusieurs milliers de personnes ont été touchées par les attentats du 13 novembre. Le questionnaire en ligne devrait permettre de recueillir un maximum de témoignages d'individus très différents, y compris de ceux qui sont passés entre les mailles des secours », explique au « Quotidien » Yvon Motreff, épidémiologiste à Santé Publique France et co-responsable d'ESPA.
L'analyse sera quantitative et qualitative, certaines questions (ces éléments vous ont-ils changé ? Quelles répercussions ont-ils eu sur votre famille, vos enfants ?) donnant lieu à des réponses libres. Des résultats préliminaires sont attendus fin 2016, début 2017, indique Yvon Motreff.
« On va essayer d'évaluer l'ensemble des tableaux cliniques », explique le Pr Thierry Baubet, pédopsychiatre, responsable de la CUMP 93 et enseignant chercheur à l'Université Paris XIII. Le syndrome de stress post-traumatique (PTSD) et les troubles associés seront explorés. « Mais on analysera aussi la dépression et d'autres pathologies. Les personnes endeuillées sont en souffrance, sans pour autant être sujettes à un PTSD », précise le Pr Baubet. Des questions portent sur les douleurs somatiques et les conséquences sur la vie professionnelle, sociale et familiale, des attentats.
Empowerment
Le questionnaire mettra en lumière le recours aux soins, ce qui permettra d'adapter les stratégies de réponse. « Nous étudierons l'articulation entre soins d'urgence et suivi. Nous avons encore beaucoup à apprendre sur l'évolution et la dynamique des symptômes. Certaines personnes présentent des symptômes aigus 3 semaines après le traumatisme, mais ils disparaîtront d'eux-mêmes. À l'inverse, d'autres peuvent décompenser plusieurs mois après », ajoute le Pr Baubet.
L'enquête est en elle-même un acte de sensibilisation voire d'« empowerment », grâce au dossier thématique associé, où sont regroupées des informations relatives aux conséquences de l'exposition à des attentats (sur les plans médico-psychologique, juridique, réglementaire, recherche, etc.). Les internautes peuvent en outre à tout moment appeler une ligne téléphonique dédiée, avec au bout du fil, une équipe de psychologues.
S'il est encore trop pour que l'Agence nationale de santé publique se prononce sur les éventuels programmes de recherche qui porteraient sur l'attentat de Nice, l'épidémiologiste Yvon Motreff souligne la pertinence du dossier thématique, qui aura vocation à s'enrichir et se pérenniser.
Renseignements : http://invs.santepubliquefrance.fr/actesterroristes
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