Hépatite A

Une épidémie liée à des tomates semi-séchées

Publié le 13/04/2011
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L’HÉPATITE A touche plus de 1 200 personnes chaque année (2 cas pour 100 000), si l’on en croit les statistiques de 2006 à 2009 (5 101 cas au total). Les deux expositions à risque les plus fréquentes sont la présence d’autres cas dans l’entourage et un séjour hors métropole. Les épidémies d’origine alimentaire sont plus rares et l’on ne relève pendant la période qu’une épidémie liée à la consommation d’huîtres, avec 111 cas, en 2007.

C’est pourquoi le nombre de cas signalés (déclaration obligatoire) entre novembre 2009 et le début de janvier 2010 dans les Hautes-Pyrénées et le Lot, avec 8 patients du côté de Lourdes-Argelès-Gazost et 6 du côté de Figeac, a attiré l’attention, d’autant que 4 autres cas étaient recensés dans les Pyrénées-Atlantique à proximité des Hautes-Pyrénées et que, dans les trois départements, de 0 à 3 cas seulement avaient été notés pour la même période de l’année précédente.

Les malades n’avaient pas voyagé dans un pays d’endémicité et n’appartenaient pas à un groupe à risque mais avaient en commun la fréquentation de deux sandwicheries appartenant à la même chaîne, l’une à Lourde, l’autre à Figeac. Quant à la souche, de génotype IB, elle avait déjà été identifiée chez deux patients résidants dans l’Indre et qui avaient fréquenté une sandwicherie de la même chaîne. D’où la décision de faire une enquête nationale.

Au total, 59 cas (49 certains, 10 probables), dont 12 cas secondaires, ont été identifiés, avec des symptômes apparus entre la mi-novembre 2009 et la mi-février 2010 et une courbe épidémique suggérant une source commune de contamination suivie d’une transmission de personne à personne. Les patients résidaient dans 19 départements, la majorité dans les Hautes-Pyrénées (15 cas) et dans le Lot (16 cas). Parmi les 27 cas non-secondaires, 27 avaient mangé un sandwich ou une salade dans une sandwicherie et 24 avaient consommé des tomates semi-séchées, dont 20 dans une sandwicherie. Et l’enquête cas-témoins a montré une consommation de tomates semi-séchées significativement beaucoup moins fréquente (17 % contre 83 %).

La piste de la Turquie.

Autre indice, l’enquête virologique, selon laquelle la souche IB épidémique avait 99,1 % d’homologie avec des souches isolées de patients ayant séjourné en Turquie. Tandis que l’enquête alimentaire mettait sur la piste d’un lot de tomates semi-séchées de 8,5 tonnes, distribué de début octobre à fin décembre 2009.

D’où l’idée de la responsabilité de tomates semi-séchées importées surgelées de Turquie et transformées en France. Ce produit avait déjà été incriminé lors d’une importante épidémie (plus de 200 cas) survenue en Australie de mars à novembre 2009 et a ensuite été mis en cause dans un groupe de 13 cas rapportés au Pays-Bas en janvier-février 2010.

L’hypothèse la plus probable dans l’épidémie en France est que la contamination a eu lieu en Turquie. L’importation de produits alimentaires de haute endémicité pour le VHA peut entraîner des épidémies dans des pays ayant une part croissante de leur population non immunisée, conclut les auteurs de l’étude. De là à déconseiller la consommation de tomates semi-séchées, à la mode ces dernières années, il y a un pas qu’ils ne franchissent pas. Mais ils estiment que cette consommation devrait être recherchée lors de l’investigation d’une épidémie d’hépatite A.

BEH, 12 avril, n°13-14 (www.invs.sante.fr/beh/).

RENÉE CARTON

Source : Le Quotidien du Médecin: 8943