22 morts dont 12 employés, et 7 patients, parmi lesquels trois enfants, au moins 37 blessés... Au lendemain du bombardement de l'hôpital de Médecins sans Frontières dans la ville afghane de Kunduz, les Etats-Unis faisaient profil bas. Le secrétaire américain à la Défense Ashton Carter a annoncé samedi qu'une "enquête exhaustive" était en cours sur ce bombardement. Dans un message de condoléances, le président Barack Obama dit attendre les résultats de l'enquête "avant de porter un jugement définitif sur les circonstances de cette tragédie". Cette frappe aérienne pourrait relever du "crime de guerre" si elle était jugée "délibérée par la justice", a déclaré le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'Homme Zeid Ra'ad Al Hussein, qui a appelé à une enquête approfondie et transparente.
Au moment du bombardement, 105 patients et 80 membres du personnel étaient présents dans l'hôpital de cette grande ville du nord qui a été le théâtre d'âpres combats entre les talibans et les forces de sécurité afghanes cette semaine. Dans une interview à l'AFP, le directeur des opérations Bart Janssens a affirmé que des bombardements se sont poursuivis "pendant plus 45 minutes" après que l'ONG a averti les armées afghane et américaine que son établissement avait été touché par de premiers tirs. MSF assure avoir transmis préventivement les coordonnées GPS de son hôpital à "toutes les parties" du conflit, et "notamment à Kaboul et Washington". "Les impacts étaient très ciblés, toujours sur le même bâtiment. L'avion est parti, puis il est revenu pour redonner suite à une série d'impacts, exactement sur le même bâtiment", a expliqué le Dr Janssens. Selon MSF, le raid a frappé le bâtiment principal de l'hôpital, qui abrite l'unité de soins intensifs et les urgences, tandis que les bâtiments alentour n'ont pas été touchés. "Les patients qui n'étaient pas en état de fuir ont été carbonisés dans leurs lits", a raconté Heman Nagarathnam, chef des programmes de MSF pour le nord de l'Afghanistan.
"Dommages collatéraux"...
Pour l’heure, l'OTAN, qui dispose toujours de 13.000 hommes - dont 10.000 Américains - en Afghanistan, n'a pas officiellement reconnu que le bombardement de l'hôpital de MSF était bien lié à un raid américain et se limite à parler de "possibles dommages collatéraux" d'une opération aérienne. Dans un communiqué, Meinie Nicolai, la présidente de l'organisation humanitaire, exige "la transparence la plus totale des forces de la Coalition", refusant le terme de "dommages collatéraux".
Selon un responsable américain, l'enquête va porter sur le rôle joué par un avion américain AC-130, un appareil dérivé de l'avion de transport C-130 équipé de plusieurs canons pour mener des opérations d'appui au sol. Le général John Campbell, le chef de la mission de l'Otan en Afghanistan et commandant des troupes américaines sur place, "envoie un général à Kunduz pour mener ces investigations", a déclaré un responsable américain à l'AFP.
MSF a évacué son personnel de de Kunduz, au lendemain de cette tragédie. "L' hôpital de MSF n'est plus en état de fonctionner. Les patients qui se trouvent dans un état critique ont été transférés vers d'autres établissements médicaux. Plus aucun employé de MSF ne travaille dans l' hôpital ", a déclaré à l'AFP Kate Stegeman, porte-parole de l'ONG en Afghanistan. "A l'heure actuelle, je ne peux pas vous dire si le centre de traumatologie de Kunduz rouvrira ou pas", a-t-elle ajouté.
Un coup dur aussi pour la population
La fermeture du centre de soins de MSF est un coup terrible pour la population de Kunduz. C'est le seul établissement capable de soigner les blessures de guerre les plus graves dans le nord-est de l'Afghanistan. Le centre de soins de MSF a apporté une aide cruciale à la population civile dès lundi et la prise de Kunduz par les talibans, puis la contre-offensive des forces de sécurité afghanes. C'est le seul hôpital dans cette région du nord de l'Afghanistan capable de traiter des grands blessés. "Il a traité 394 blessés depuis lundi", a expliqué Bart Janssens. La Croix-Rouge a parlé d'une "effroyable tragédie", tandis que la France a appelé à ce qu'"une enquête soit conduite".
(avec AFP)
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