Deux grandes questions se posent quand une femme épileptique envisage une grossesse. La plus importante est l’influence tératogène des antiépileptiques. On sait aujourd’hui que certains sont beaucoup plus tératogènes que d’autres. Ainsi, le valproate de sodium (Dépakine) est assorti d’une tératogénicité assez importante et dose-dépendante (1).
« En cas de désir de grossesse, déclare la Pr Sophie Dupont, l’idéal est d’arrêter ce médicament et de le remplacer par un autre mais avec le risque de déséquilibrer la maladie ». Mais quel que soit l’antiépileptique, cela a été démontré pour certains médicaments mais vaut probablement pour tous, la tératogénicité est dose-dépendante (1,2).
En outre, la polythérapie, même sans valproate de sodium, augmente le risque de malformations fœtales. Pour les femmes qui présentent des épilepsies difficiles à équilibrer, on peut envisager une grossesse sous bithérapie, mais, souligne S. Dupont, « il n’est pas raisonnable d’aller au-delà. Si on ne peut pas arrêter les médicaments, il faut déterminer le seuil jusqu’auquel on peut descendre dans les quatre premiers mois de grossesse en sachant que les mois suivants, la concentration plasmatique des antiépileptiques diminue et qu’il sera nécessaire d’augmenter les doses pour retrouver des taux plasmatiques constants et protecteurs. Ceci nécessite un réel monitoring plasmatique des médicaments » (3,4).
Outre la possibilité d’éventuelles malformations fœtales, un autre souci important est généré par les antiépileptiques pendant la grossesse, et là encore le valproate de sodium pose problème. En effet, des études montrent que les enfants nés de mères qui ont pris ce médicament pendant la grossesse ont probablement un développement psychomoteur (notamment dans le domaine verbal) un peu inférieur à celui des enfants nés de mères traitées avec d’autres antiépileptiques, le QI étant ajusté au QI maternel (5). Il existerait également une légère augmentation du risque de syndrome autistique chez les enfants dont la mère prenait du valproate de sodium, mais ceci reste à confirmer (6).
Enfin, chez les femmes dont l’épilepsie est mal équilibrée pendant la grossesse, il n’y a aucun argument pour dire que les crises sont tératogènes en elles-mêmes mais elles peuvent parfois présenter un caractère dangereux en cas de chute ou de perte de connaissance avec traumatisme. Cependant, les femmes qui présentent des crises généralisées tonicocloniques pendant la grossesse sont plus à risque d’avoir des enfants de petit poids de naissance, voire même des naissances un peu prématurées (7). Enfin, on sait aujourd’hui que le risque de crises est identique quel que soit l’âge de la grossesse.
(1) Campbell E et al. J Neurol Neurosurg Psychiatry. 2014;85:1029-34
(2) Tomson T et al.. Lancet Neurol 2011;10:609-17
(3) Battino D et al. Epilepsia 2013;54:1621-27
(4) Tomson T et al. Epilepsia 2013;54:405-13
(5) Meador KJ et al. Lancet Neurol. 2013;12:244-52
(6) Christensen J et al. JAMA. 2013;309:1696-703
(7) Rauchenzauner M et al. J Neurol 2013;260:484-88
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