« Cypher », de Vincenzo Natali

Claustrophobie

Publié le 01/04/2003
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Six personnes enfermées dans un cube. Il faut avoir bien du talent pour en faire un film palpitant - et angoissant - de bout en bout. C'est ce qu'a réussi le jeune réalisateur canadien Vincenzo Natali, qui dit avoir décidé de faire du cinéma après avoir vu « la Guerre des étoiles ». Fabriquer des images pour manipuler le spectateur, il sait le faire, comme le prouve son deuxième film, inspiré d'un scénario tordu de Brian King.

Voici un homme a priori sans qualités particulières qui parvient, après avoir, on le devine, surmonté de nombreux obstacles, à se faire embaucher par une multinationale pour faire de l'espionnage industriel. Il se retrouve dans une de ces conventions commerciales dont raffolent les Américains. Et c'est le début d'une aventure à rebondissements avec manipulations en tous genres.
Le réalisateur joue avec les couleurs, qui apparaissent peu à peu à partir d'un fond blanc grisâtre. Il joue avec les espaces, toujours fermés, toujours artificiels. Il joue avec les images et les effets spéciaux, le plus imperceptibles possibles. Cela pour enfermer son héros mais aussi le spectateur dans son histoire. C'est le triomphe de la claustrophobie. Et de la paranoïa : chaque personnage est à la fois manipulé et manipulateur, on le découvre peu à peu mais sans savoir dans quelles proportions.
Vincenzo Natali s'amuse aussi avec les citations, cinématographiques, hitchcockiennes en premier lieu. Et il se révèle également habile dans le choix de ses interprètes, Jeremy Northam (« l'Honneur des Winslow», « Gosford Park »), élu pour son « physique à l'ancienne » et son « air vulnérable »* et la belle et souple Lucy Liu (la série télévisée « Ally McBeal », « Charlie et ses drôles de dame »), mystérieuse à souhait.
On peut trouver que l'histoire ne tient pas debout, qu'elle est trop tarabiscotée, qu'une ou deux scènes d'action sont inutiles, que tout cela manque de sens. Mais l'exercice est stimulant pour l'intellect. On ne peut pas en dire autant de la plupart des grosses productions actuelles. Alors...

Entretien avec « le Nouvel Observateur » du 29 mars).

R. C.

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7307