La santé en librairie
EN PRESQUE quarante ans, la pratique de l’obstétrique a changé du tout au tout ; ou presque. Violaine Kerbrat a vécu, dans le service du Pr René Frydman, ces bouleversements et ces transformations dont on a peut-être tort d’oublier de s’émerveiller aujourd’hui : échographie, réanimation néonatale, pratique des épidurales dans les années 1970, aventure de la procréation médicalement assistée avec, entre autres événements majeurs du service, la mise au monde d’Amandine, le premier enfant issu d’une fécondation in vitro en France. Son ouvrage raconte avec simplicité et émotion ce chemin parcouru, souligne l’ingéniosité, l’audace, l’énergie contagieuse et la ténacité de tous ceux qui ont participé au bouleversement de l’obstétrique, Émile Papiernik, Jacques Testard, René Frydman. Et évoque le quotidien du service, les rencontres avec les (futurs) mères et pères, l’arrivée des enfants, les bonheurs et les souffrances, les questionnements sur les acquis scientifiques.
Au tout début de sa carrière se souvient Violaine Kerbrat, à l’aube des années 1970, « les bébés venaient comme ils étaient, malformés, siamois, prématurés » ; la mortalité périnatale, à 50/1 000 dans les années 1950, était passée à 23/1 000 en 1970 ; elle est aujourd’hui de 4/1 000. Hier, on laissait mourir voire on forçait un peu le trépas des grands prématurés : « Je détestais ces moments-là, j’avais hâte que l’affreuse agonie s’achève. » Aujourd’hui, plus de 20 000 enfants issus des techniques de PMA naissent chaque année dans notre pays, le diagnostic préimplantatoire et d’autres techniques se sont développés. Réglant de nombreuses difficultés qui permettent à d’autres d’émerger, souligne l’auteur, de l’âge croissant des femmes désireuses de grossesse aux questions posées par le diagnostic préimplantatoire, le don de sperme ou d’ovocyte, en passant par les drames générés par le désir d’enfant non assouvi malgré les PMA.
Violaine Kerbrat, qui a vécu au jour le jour ces avancées extraordinaires, continue de croire que la science peut progresser pour le meilleur dans le respect de l’éthique et ne partage pas l’inquiétude des opposants aux travaux sur les cellules souches. « Chez nous, la médecine n’est pas un commerce. C’est notre différence et notre force », écrit-elle.
Cabinet de curiosités.
Le gynécologue Alain Bellaiche évoque certains épisodes marquants vécus dans son cabinet de consultation : tourments et drames féminins, relations avec les hommes, féminisme et féminité, enfants et interruptions de grossesse plus ou moins volontaires. C’est un des charmes de la médecine : approcher au plus près la singularité et l’intimité de chacun.Croiser d’autres vies que la nôtre, les partager, les soutenir.
Histoires plus ou moins paradigmatiques des paradoxes, injustices ou absurdités de notre société, tranches de vie moins anecdotiques qu’elles n’y paraissent servent de points de départ à des réflexions plus générales sur la médecine, la Sécurité sociale, la famille, le couple, le vieillissement, l’invasion du virtuel dans nos vies, la PMA.
L’auteur, qui se définit comme un « penseur de terrain », adepte du bon sens et critique virulent de la pensée unique et politiquement correcte, appelle à une réflexion digne de ce nom laquelle est pour l’instant « moribonde, rétrogradée, remplacée par le simple réflexe. Réflexe que l’on va conditionner à souhait, au gré des exigences commerciales ou politiques du moment. »
Violaine Kerbrat, « Secrets de sage-femme »,Calmann-Levy, 180 pages, 15 euros.
Alain Bellaiche, « Un gynéco dans la ville », L’Âge d’homme, 150 pages, 17 euros.
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