Déconventionnement, une idée qui fait son chemin...

Publié le 16/04/2015

Crédit photo : Phanie

Après le vote sur le projet de loi de santé à l’assemblée nationale ressenti comme un affront par beaucoup de médecins, que la procédure accélérée et la présence de seulement 35 élus pour se prononcer surle tiers payant a ulcérés, les esprits s’échauffent. Et, même si les pouvoirs publics n’y croient guère, ça et là de petits groupes de médecins libéraux semblent songer à se déconventionner.

Ainsi dans le Finistère, dans le Nord ou en Hautes-Pyrénées, on voit refleurir des initiatives qui rappellent un peu les coordinations de 2002. Dans ce dernier département, le Dr Patrick Guenebeaud, qui exerce à La Loubere évoque la mise en place avec ses confrères d’une "charte de solidarité" contre la loi Touraine et le TPG. Avec ses confrères ils discutent de la situation et menacent de fermer leurs cabinets et de retourner manifester, explique-t-il en substance. Ils n’en sont encore qu’aux menaces mais s’ils ne sont pas écoutés le déconventionnement pourrait être envisagé, à contre cœur, comme une solution, explique le généraliste.

Dans le Nord en revanche, le déconventionnement tient la corde d’après le Dr Jean-Luc Montreuil de Lys-Lez-Lannoy. Il y a deux semaines, 150 médecins se sont réunis pour voter en faveur (148 pour et 2 contre) d’un mouvement général de déconventionnement dans le cas où leurs revendications vis-à-vis du tiers payant seraient encore une fois jetées aux oubliettes, en cas d’adoption définitive de la loi Touraine donc.

Les médecins de la région ont réamorcé la coordination nationale de 2002 et ont aussi mis en place un site internet www.conat.net auquel plus de 5000 médecins en désaccord avec la loi de santé et le TPG se seraient déjà connectés. Ce site donne accès à des lettres ouvertes de médecins de la région qui mettent en garde leurs députés ou sénateurs.

"J’inscris sur ce courrier mon souhait d’effectuer dans les semaines qui viennent une demande de déconventionnement" annonce par exemple le Dr Didier Brique (Dunkerque) dans son courrier aux députés et aux sénateurs, qui explique que "la coupe est pleine, car la fatigue est grande et le défaut de reconnaissance de notre profession devient humiliant." De son coté, le Dr Loïc Watine (Wasquehal) écrit que "c’est la première fois que je me sens autant menacé dans l’exercice de mon métier de médecin, au point que je songe sérieusement à me joindre à un mouvement général de déconventionnement. La Convention jusqu’à maintenant respectait peu ou prou mon indépendance, mon serment d’Hippocrate et ma déontologie." "Cette dévalorisation de la médecine libérale est devenue intolérable pour beaucoup d’entre nous et l’annonce d’une nouvelle et ultime dégradation notemment par le tiers payant généralisé et obligatoire m’oblige à penser au déconventionnement" juge aussi le Dr Caroline Bachelet-Guelton (Dunkerque).

Un point de vue partagé aussi par le Dr Pierre Gadenne (Templeuve) qui explique que "j’ai souvent dû subir des réformes et des tracasseries, ayant peu à peu la sensation de devoir être un effecteur obéissant et de moins en moins un médecin libéral, mais c’est la première fois que je me sens autant menacé, au point que je pense sérieusement à me joindre à un mouvement de déconventionnement." Le Dr Yves Blanc-Garrin (Villeneuve-d'Ascq) va même plus loin en déclarant que "dans ces conditions j’envisagerai de me déconventionner vis à vis de la sécurité sociale et pourquoi pas aller jusqu’à dévisser ma plaque, ne me restant que quelque temps avant ma retraite, afin de soutenir la jeune génération de médecins et de défendre à juste titre la profession."

Ce mouvement est bien entendu suivi attentivement par les syndicats, qui jusqu’alors ne s’y sont pas associés. "Le déconventionnement, c’est l’arme atomique", explique ainsi Luc Duquesnel, qui concède que "de plus en plus de médecins généralistes parlent de déconventionnement et c’est tout à fait réfléchi."



Source : lequotidiendumedecin.fr