« LA FRANCE a un vrai rôle à jouer dans l’élaboration des recommandations au niveau européen. L’European Society of Clinical Microbiology and Infectious Disease (ESCMID) est en effet très preneuse d’infectiologues ayant, comme c’est le cas en France, une forte expérience dans le domaine des conférences de consensus et des recommandations. L’infectiologie française a un savoir-faire que nous devons faire partager », explique le Pr Jean-Paul Stahl, chef du service des maladies infectieuses du CHU de Grenoble et ancien président de la Société de pathologie infectieuse de la langue française (SPILF), dont il est aujourd’hui délégué aux affaires internationales. « L’objectif de l’ESCMID est de produire de la formation et des recommandations au niveau européen. Ces recommandations ne peuvent pas toujours être appliquées dans tous les pays de la même manière. Les moyens disponibles, localement, sont une contrainte à prendre en compte. Il est bien évident que les services d’infectiologie en Roumanie par exemple n’ont pas forcément les mêmes moyens que les services en France ou en Allemagne », souligne le Pr Stahl. Parmi ces recommandations, on peut citer celles sur le VIH/sida, celles sur l’hépatite B coordonnées par le Pr Dominique Salmon ou celles sur les endocardites placées sous la responsabilité du Pr Bruno Hoen.
Milan 2011.
Le prochain congrès de l’ESCMID aura lieu en 2011 à Milan. « Les infectiologues français sont nombreux à participer à ce congrès important. En nombre de participants, nous arrivons juste derrière les Anglo-saxons », explique le Pr Stahl, en précisant que les adhésions à l’ESCMID se font à titre individuel. « Il ne s’agit pas d’une Fédération des sociétés savantes européennes. La participation institutionnelle de la SPILF à l’ESCMID se fait donc via les adhésions individuelles de ses membres », indique-t-il en ajoutant qu’il existe différents moyens pour l’infectiologie française de « peser » sur la scène européenne. « Le premier est d’avoir le maximum d’adhérents à l’ESCMID. Le deuxième est de proposer le plus grand nombre de publications possibles. Le troisième, enfin, concerne les formations pouvant être proposées au niveau européen ». Il y a un an et demi, le Pr Stahl a ainsi organisé au CHU de Grenoble un séminaire sur les zoonoses. « La provenance des étudiants (des infectiologues seniors) était très variée : Scandinavie, Hongrie, Allemagne… », explique-t-il, en ajoutant qu’il organisera en mars prochain un nouveau séminaire, cette fois sur les encéphalites.
Une distinction entre cliniciens et biologistes.
Une des originalités de la France, en matière d’infectiologie, est, selon le Pr Stahl, la distinction entre les cliniciens et les biologistes. « Chacun s’investit pleinement dans son rôle et est complémentaire avec l’autre. L’avantage est que cela permet de disposer d’une expertise très poussée aussi bien dans le domaine clinique que biologique. C’est un réel atout ».
Le Pr Stahl vient aussi d’être nommé représentant de la France au sein de l’Union européenne des médecins spécialistes (UEMS). « Cette structure syndicale défend les intérêts de toutes les spécialités mais il est clair qu’un de nos objectifs, sera d’essayer de faire reconnaître l’infectiologie comme une spécialité partout en Europe ».
Il reste maintenant peut-être à l’infectiologie européenne à être capable de trouver une parole commune sur les grandes problématiques concernant la spécialité. Cette parole européenne s’est faite assez peu entendre, l’an passé, lors de la pandémie grippale. « À l’époque, il y a eu une prise de parole au niveau du Conseil de l’Europe sur le volet politique, rappelle le Pr Stahl. Ensuite, les institutions de veille sanitaires des différents pays européens ont bien collaboré entre elles comme elles ont pris l’habitude de le faire. Quand aux sociétés savantes, elles se sont investies mais principalement au niveau national. Il est vrai que la gestion de la crise a été très largement placée dans les mains des politiques. On l’a bien vu en France. Les infectiologues pouvaient dire ceci ou cela, mais au final, c’est la ministre qui décidait… ».
* D’après un entretien avec le Pr Jean-Paul Stahl, chef du service des maladies infectieuses du CHU de Grenoble, ancien président de la Société de pathologie infectieuse de la langue française (SPILF), délégué aux affaires internationales de la SPILF.
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