« Partout dans le monde, la fréquence des allergies alimentaires et des cas d'anaphylaxie sévère augmente. Ceci est encore plus vrai chez l'enfant et notamment avant 5 ans », insiste le Dr Guillaume Pouessel, pédiatre à l'hôpital de Roubaix.
Chez l'enfant, la première cause d'anaphylaxie est alimentaire : lait de vache, œuf de poule, puis arachide, fruits à coque. « D'autres allergènes provoquent aussi de très graves réactions (lait de chèvre et de brebis, soja, noix de cajou, pistache, noisette, kiwi…) », note le Dr Pouessel. Selon l'aliment, l'histoire naturelle de l'allergie varie. Les enfants ont le plus souvent tendance à guérir d'une allergie au lait de vache dans les 2 premières années de vie. À l'inverse, l'allergie à l'arachide est souvent persistante et s'amplifie dans le temps (allergies croisées avec des fruits à coque). Elle peut parfois relever d'une induction de tolérance (après expertise allergologique, dans un centre référent). D'autres causes d'anaphylaxie sont plus rares chez l'enfant : piqûres d'hyménoptère, médicaments (antibiotiques et surtout pénicillines ; anti-inflammatoires non-stéroïdiens et paracétamol, principalement), latex.
Quels sont les facteurs de risque de réaction grave ? Les maladies allergiques (asthme surtout…), le terrain (adolescence, mastocytose), certains aliments à risque (arachide, lait de chèvre et de brebis, par exemple), l'effort physique et certaines prises médicamenteuses (bêtabloquants, IEC…). « Le médecin, plus souvent confronté à la description de signes avant-coureurs par les parents qu'à l'anaphylaxie, ne doit pas hésiter à adresser l'enfant à l'allergologue (pour faire le tri dans les suspicions d'allergies, poser un diagnostic, évaluer le risque d'anaphylaxie) », conseille le Dr Pouessel.
Conduite à tenir
« L'atteinte respiratoire, bronchospasme ou angio-œdème laryngé, caractérise l'anaphylaxie chez l'enfant. C'est aussi ce qui fait la gravité à cet âge », précise le Dr Pouessel.
Que l'allergène soit ou non connu, il faut suspecter l'anaphylaxie devant la survenue rapide de différents signes qui s'associent touchant 2 organes ou plus : cutané (urticaire, éruption, démangeaisons…), digestif (crampes abdominales, vomissements…), respiratoire (bronchospasme, sifflements, gêne respiratoire, toux, modification de la voix…), neurologique (apathie, léthargie, changement de comportement…), cardiovasculaire.
Dès les premiers signes d'anaphylaxie, l'adrénaline en intramusculaire (IM), à raison de 10 µg/kg (maxi 0,5 mg) doit être administrée avant d'appeler le SAMU, et même au cabinet ! « Les stylos auto-injecteurs d'adrénaline (3 marques, bientôt 4) fiabilisent l'injection IM : moins d'erreurs de manipulation, rapidité de l'injection, fiabilité du stockage (conservation plus d'un an à température ambiante). Ils permettent de traiter l'enfant selon son poids : de 7,5 à 25 kg (0,15 mg) ; de 25 à 60 kg (0,30 mg) ; au-delà de 60 kg (0,50 mg, bientôt disponible) », explique le Dr Pouessel, soulignant l'absence de contre-indication absolue à l'utilisation de l'adrénaline par voie IM chez l'enfant et la très bonne tolérance après l'injection. « Le risque est de ne pas traiter par adrénaline IM une anaphylaxie qui débute et non pas de faire l'injection ! » souligne le Dr Pouessel.
En attendant le SAMU pour la suite de la prise en charge, l'enfant doit être laissé dans la position dans laquelle il se sent bien : si difficultés à respirer, assis ; si hypotension ou malaise, décubitus dorsal et en surélevant les jambes.
Au décours de l'épisode, l'enfant est adressé en consultation d'allergologie : diagnostic précis, trousse d'urgence, éducation thérapeutique (mesures de prévention, éviction de l'allergène), problématiques de scolarité (projet d'accueil individualisé) et suivi. Si besoin, régime alimentaire (diététicienne). Le spécialiste précise que « la communauté des allergologues souhaite un plus large accès aux stylos d'adrénaline dans les lieux à risque (écoles, salles de sport, etc.) comme aux États-Unis ou au Canada ».
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