EN FRANCE, où le nombre d’interruptions volontaires de grossesse (IVG) ne diminue pas, une politique de communication sur le thème de la contraception a été relancée depuis quelques années. Dans ce contexte, plusieurs enquêtes de population ont permis de dresser un état des lieux des connaissances des Françaises et des Français dans ce domaine et de mieux évaluer les besoins d’informations.
La contraception dans son ensemble est bien acceptée par une très grande majorité des Français. L’usage des différents moyens de contraception a été détaillé dans le dernier Baromètre Santé. Globalement, en 2005, près de trois-quarts des Français sexuellement actifs âgés de 15 à 54 ans déclaraient utiliser une méthode contraceptive, qu’elle soit naturelle, mécanique ou médicamenteuse. Les méthodes médicales sont les plus employées, la pilule représentant à elle seule 57,4 % des moyens de contraception des Françaises. Les jeunes femmes sont celles qui prennent le plus la pilule, puisque plus de 80 % des 20-24 ans l’utilisaient en 2005. Il s’agit du contraceptif le plus utilisé dans toutes les tranches d’âge, à l’exception des femmes de 45 à 54 ans qui privilégient majoritairement le stérilet. Les dispositifs intra-utérins se placent en deuxième position et sont choisis par près d’un quart des Françaises. Son utilisation est cependant encore marginale chez les moins de trente ans (4,3 %) et chez les nullipares (2,4 %).
L’utilisation des méthodes contraceptives non médicales apparaît corrélée à la situation affective et sociale des femmes : elles sont plus fréquentes chez les femmes vivant seules, sans enfant ou qui ont eu plusieurs partenaires au cours de l’année. Les méthodes non médicales sont représentées en majorité par les préservatifs (80 %), particulièrement chez les plus jeunes (15-19 ans), mais aussi par les méthodes locales (diaphragme, spermicide…) et naturelles (abstinence périodique, retrait), même si ces dernières ont diminué depuis quelques années pour ne concerner plus que 2,8 % des femmes.
Un paradoxe français.
Une enquête menée en 2007 par l’INPES et l’institut BVA sur « les Français et la contraception » auprès d’un échantillon de 2 004 personnes montre que 95 % des Français sont satisfaits de leur moyen de contraception. Les diverses méthodes offertes sont assez bien connues : la pilule et le préservatif par 97 % des personnes interrogées, le stérilet par 93 %, le préservatif féminin et le diaphragme par près de 75 %. Les autres méthodes (spermicides, implant, anneau, patch) le sont chacun par près de la moitié d’entre elles.
Malgré ces résultats, et le fait que le taux de recours et de diffusion de la contraception soit parmi les plus élevés d’Europe, les grossesses non prévues représentent, en France, encore une grossesse sur trois. On dénombre plus de 200 000 IVG par an. Ce chiffre est stable depuis plusieurs années et le taux d’IVG a même augmenté dans certaines catégories d’âge, chez les mineures et les femmes de moins de 20 ans.
Ce paradoxe est en grande partie lié à une mauvaise gestion quotidienne des moyens de contraception, essentiellement des oublis de pilule ou des accidents de préservatif. En effet, plus de la moitié des Françaises ayant eu recours à une IVG en 2004 avait eu recours à un moyen de contraception (pilule : 23 %, préservatif : 19,3 %), et seuls 28 % de ces grossesses non désirées étaient la conséquence d’un rapport sans aucune protection contraceptive. Les oublis de pilule sont particulièrement fréquents. Ainsi dans l’enquête INPES-BVA, il apparaît que plus d’une femme sur 5 oublie de prendre sa pilule au moins une fois par mois. Seul un tiers déclare ne jamais l’oublier. Le risque d’échec de la contraception semble plus élevé lors des périodes de transition contraceptive, comme en post-partum ou lors un changement de méthode.
Idées reçues et défaut d’information.
La contraception d’urgence, dont l’utilisation s’est beaucoup développée ces dernières années, n’est cependant pas encore assez employée dans ces situations d’oublis de pilule ou d’accident de préservatifs. Les femmes de plus de 25 ans semblent y avoir moins recours et être moins bien informées que les plus jeunes, alors qu’elles sont tout autant exposées au risque de grossesse non désirées. De plus, si l’existence de la contraception d’urgence est bien connue des Françaises, ses modalités d’utilisation le sont moins. Ainsi, en 2005, seuls 11,7 % connaissaient le délai d’efficacité de 72 heures.
Ce défaut d’information ne concerne pas que la contraception d’urgence comme l’a révélé l’enquête INPES-BVA. De nombreuses idées reçues persistent, et il existe une certaine méconnaissance du cycle féminin et de l’utilisation des méthodes contraceptives. Pour exemple, 34 % des 15-20 ans interrogés pensent que la pilule peut rendre stérile, 50 % des Français croient que le stérilet ne peut être posé que si la femme a déjà eu un enfant. Plus de la moitié pense qu’une femme ne peut pas tomber enceinte si le rapport a eu lieu pendant les règles. Parmi ceux qui connaissent les nouvelles voies d’administration progestative (implant, anneau, patch), un sur deux ne connaît pas leur durée d’efficacité. Enfin, la moitié des 15-20 ans ne connaît pas la recommandation de ne pas fumer lorsqu’on prend la pilule.
Ces fausses représentations et perceptions des méthodes contraceptives se retrouvent dans une analyse qualitative des appels reçus par le service d’écoute téléphonique Fil Santé Jeunes, au cours de l’année 2007. Cette étude montre également les tabous qui existent autour de la sexualité des jeunes et qui représentent un frein majeur à une contraception bien gérée. Si ces tabous se confondent parfois avec certains principes culturels, il n’y a pas de spécificité culturelle au manque d’information sur la contraception.
Sources :
- Moreau C. et al. Baromètre Santé 2005.
- Contraception : que savent les Français ? Connaissances et opinions sur les moyens de contraception : état des lieux. Dossier de presse INPES juin 2007.
- Favoriser le dialogue sur la contraception. Dossier de presse INPES mai 2008.
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