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Euthanasie : un généraliste belge enjoint la France à légiférer

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Publié le 12/10/2018
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Dans « Docteur, rendez-moi ma liberté »*, le Dr Yves de Locht raconte sa pratique de l’euthanasie en Belgique et invite ses confrères français à réviser leur loi « hypocrite » pour laisser les gens décider librement de leur fin de vie.
Euthanasie

Euthanasie

Tout a commencé en 2003 par l’histoire d’un prêtre parkinsonien qui refuse d’attendre la volonté de Dieu. Il rencontre le Dr Yves de Locht et lui demande d'abréger ses souffrances ; l’euthanasie vient d’être légalisée en Belgique. D'abord récalcitrant, le généraliste d'Ixelles finit par accepter de donner le « dernier soin ». C'est le début d'une vocation. Aujourd’hui, le généraliste belge ne reçoit presque plus que des Français.

Dans cet ouvrage, le praticien démonte les idées reçues colportées selon lui par ses confrères français, les politiques et les médias. Non, les médecins belges ne sont pas des « machines à donner la mort », qui pratiquent des euthanasies à la chaîne. « Nous ne cachons pas de seringues derrière notre dos », souligne le médecin qui déclare abréger l'agonie, non la vie. Les lois belges encadrent très strictement l'euthanasie. Plusieurs praticiens doivent confirmer le diagnostic. Le patient doit être atteint d’une « affection accidentelle ou pathologique grave et incurable » et avoir plusieurs fois formulé sa demande par écrit. La souffrance induite doit être « constante, insupportable et inapaisable ».

Aucune souffrance

Dépeignant sans filtre la douleur des malades incurables, le septuagénaire porte un regard critique sur la fin de vie en France où « 4 000 euthanasies clandestines » seraient réalisées chaque année. « On se demande parfois comment les médecins de France peuvent laisser dans un tel état ces personnes… J’ai déjà dû pratiquer ce soin ultime dans une voiture, depuis la place du conducteur car le patient ne pouvait pas en sortir. » La sédation profonde, rendue possible en France par la loi Claeys-Leonetti (2016), que le comité d'éthique ne souhaite pas réformer, relève de « l’hypocrisie », affirme le praticien. « C’est une euthanasie qui ne dit pas son nom », car elle donne lieu à la mort. Les patients ne sont plus hydratés ni alimentés : on ignore ce qui se passe dans cette période de parfois plusieurs semaines. Avec la substance donnée par les médecins belges, le patient qui souffre le plus souvent d'un cancer ou d'une maladie neurodégénérative, s’endort « sans aucune souffrance »

Le médecin belge qui fait face à une très importante demande de patients en détresse a fait un choix « personnel » et drastique. « Je ne pourrais m’acquitter que d’une euthanasie par semaine », expose-t-il. La charge émotionnelle est trop forte.

* « Docteur, rendez-moi ma liberté », aux Éditions Témoignage Michel Lafon, 238 pages, 17,95 euros,


Source : lequotidiendumedecin.fr