Depuis 2013, le Haut Conseil de santé publique (HCSP) recommande d’isoler systématiquement les patients arrivant à l’hôpital et ayant été hospitalisés à l’étranger, en raison de leur sur-risque d’être porteurs de bactéries transmissibles multirésistantes (BMR), voire « hautement résistantes émergentes » (BHRe, résistantes à tous les antibiotiques habituellement efficaces pour l’espèce).
Lors de la 35e réunion interdisciplinaire de chimiothérapie anti-infectieuse (RICAI) se tenant à Paris les 14 et 15 décembre, l’équipe d’hygiène de l’AP-HP a présenté une étude réalisée entre 2004 et juillet 2015 sur ses 39 hôpitaux. Les résultats montrent que le nombre de patients dépistés porteurs d’entérobactéries productrices de carbapénèmases (qui sont des BHRe) augmentait fortement depuis le début de l’année 2014. Parmi les porteurs, environ 80 % avaient effectué un séjour à l’étranger dans l’année, ce taux étant stable sur toute la durée de l’étude. La proportion des patients porteurs ayant simplement voyagé sans avoir été hospitalisés augmente en revanche depuis 2014, où il atteint 34 %.
Un surcoût de près de 3 millions d’euros pour l’AP-HP en 2014
Une étude réalisée par la même équipe s’est intéressée au surcoût généré par la prise en charge des patients porteurs de BHRe à l’AP-HP durant l’année 2014. Sur un an, 220 alertes ont été répertoriées, dont 12 épidémies.
Le surcoût total était de 2 870 000 euros, et le coût moyen par patient porteur était beaucoup plus élevé en cas d’épidémie que pour les cas isolés. Les conditions initiales de prise en charge du patient dans les premières 48 heures (mise en place d’un isolement « contact » ou non) influaient de façon importante sur la survenue d’une épidémie et sur le surcoût, ce qui confirme l’importance de repérer les patients à risque dès leur entrée dans le circuit hospitalier.
Ces études rappellent l’enjeu sanitaire et économique de l’importation des BHRe à l’hôpital, et soulèvent la question de la pertinence d’un dépistage des patients hospitalisés dans les suites d’un simple séjour à l’étranger. Cette option n’avait pas été retenue en 2013, mais pourrait être rediscutée.
Cependant, comme le rappellent les auteurs, ces études observationnelles ne permettent pas d’évaluer précisément le volume de portage de BHRe à l’APHP, et des études interventionnelles sont nécessaires à large échelle pour préciser ces données et évaluer correctement le rapport bénéfice-coût d’un dépistage à grande échelle des patients ayant voyagé.
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