COMMENT inscrire les innovations dans l’arsenal thérapeutique existant ? Et comment accompagner au mieux la délégation de compétences ? Ces questions doivent être au cœur de la réflexion sur l’avenir des pratiques de soins en psychiatrie. Selon le Dr Hardy-Baylé, « il est clair que l’innovation doit s’inscrire dans l’arsenal thérapeutique existant et non remplacer les thérapeutiques qui ont fait leurs preuves. Il est essentiel d’œuvrer pour appuyer nos pratiques de soins sur des arguments de preuves au sens non seulement scientifique – arguments dits de rang A – mais également professionnel du terme. Cela nécessite la présence de professionnels auprès d’organismes tels que la Haute Autorité de santé (HAS). Cela met aussi en évidence la nécessité de promouvoir la recherche qui sous-tend l’innovation thérapeutique en ce qu’elle apporte des arguments de preuves. Ensuite, il convient que cette innovation thérapeutique puisse être diffusée à l’ensemble des acteurs de la santé, ce qui suppose que cette diffusion repose sur une bonne organisation de la santé », en précisant que l’amélioration des pratiques ne pourra « se faire que dans le cadre d’une bonne organisation et au meilleur coût ».
Une mauvaise coopération généralistes-psychiatres.
Pour le Dr Hardy-Baylé, la question de la délégation des compétences est au centre de l’avenir des pratiques. « La question est de savoir jusqu’où il faut aller et comment accompagner cette évolution. La première exigence est celle d’une qualité maximale dans la mise en œuvre de cette délégation », souligne-t-elle en évoquant la question cruciale de la relation entre le généraliste et le psychiatre dans le parcours du soin du patient. « Les différentes études réalisées ces dernières années montrent tout d’abord que, en termes d’intention de consultation pour des difficultés psychologiques, c’est le généraliste qui reste, et de très loin, le premier interlocuteur du patient. On constate aussi que la France fait partie des pays européens où la coopération entre le généraliste et le psychiatre est la plus mauvaise. On se rend compte que lorsqu’il y a un " adressage ", le patient, dans 80 % des cas, ne retourne pas chez le généraliste. Il y a une sorte de " captation " qui s’explique peut-être par le fait que le psychiatre estime que le généraliste n’a pas la capacité de suivre le patient. Il y a donc la nécessité de mettre en place des dispositifs partenariaux et apprenants pour les généralistes pour qu’au final, ce soit le meilleur soin qui soit apporté au patient, estime le Dr Hardy-Baylé, en prenant l’exemple du choix de la psychothérapie à mettre en œuvre chez un patient. C’est dans la très grande majorité des cas le généraliste qui, au départ, fait ce choix alors que l’on sait que ce qu’il y a de plus difficile en psychiatrie, c’est de décider avec le patient du meilleur levier de changement et donc du choix de la psychothérapie. Évaluer la pertinence d’une psychothérapie suppose de toutes les connaître et d’avoir une croyance limitée en chacune pour ne pas avoir une position d’idéologue. La question n’est pas de savoir si la thérapie cognitivo-comportementale est meilleure qu’une thérapie analytique. Elle est de savoir quelle psychothérapie il faut pour ce patient, à ce moment de son histoire. »
› ANTOINE DALAT
D’après un entretien avec le Dr Marie-Christine Hardy-Baylé, psychiatre au centre hospitalier de Versailles et présidente du Collège national universitaire de psychiatrie.
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