L’état des lieux de la fibrillation auriculaire dressé par Rand Europe n’est pas reluisant. Selon cette ONG spécialisée dans l’analyse de données de santé, 10 millions de patients en Europe de l’Ouest sont touchés par cette pathologie, qui représente chacun 5 000 à 30 000 euros de frais d’hospitalisation annuels suite à un AVC.
Malgré ces chiffres astronomiques, la fibrillation auriculaire n’est pas considérée comme un problème de santé publique, et reste mal connue du grand public et des médecins, en dehors des cardiologues. De surcroît, plus de la moitié des patients ne seraient pas correctement traités par anticoagulation.
Pour parvenir à ce constat, les auteurs ont passé en revue 200 articles scientifiques et recommandations de sociétés savantes, et ont mené 60 entretiens de médecins dans six pays : La Belgique, la France, le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Espagne et l’Italie.
Un diagnostic simple… mais peu réalisé
« Le diagnostic de la fibrillation atriale est simple, une prise du pouls suffit, à faire confirmer grâce à un ECG », rappelle le Pr John Camm, professeur de cardiologie à l’Imperial College de Londres qui préside le comité d’experts « Future of Anticoagulation » qui a rendu public le rapport. « Il n’est pas normal qu’autant de patients découvrent leur pathologie par hasard, après un premier AVC, reproche-t-il. La mesure du rythme devrait être systématique au-delà de 55 ans. »
Le panel de 10 spécialistes européens rassemblé par Rand Europe et Daiichi Sankyo (qui finance l’initiative) ont formulé plusieurs recommandations sur la base de ce rapport, à commencer par la diffusion de campagnes d’information. « Environ 60 % des patients ne sont pas capables de décrire précisément leur propre maladie », s’alarme le Pr Camm, par ailleurs corédacteur des recommandations sur la prise en charge de la fibrillation atriale de la société européenne de cardiologie. Les experts pointent également un cruel manque de données en ce qui concerne la stratification des patients, et la personnalisation des soins. « Dans ce domaine, les derniers résultats de l’essai BEST indiquent que les biomarqueurs comme la troponine et la NT-proBNP permettent de prédire le risque d’AVC par exemple », précise le Pr Camm. Les auteurs plaident également pour une meilleure collaboration entre les soins primaires et secondaires afin de renforcer l’approche globale du patient. Enfin, le développement de la télémédecine est considéré comme une source importante d’amélioration du suivi.
Informer sur les AOD
Lors de la présentation de leur rapport, les auteurs ont regretté que les anticoagulants oraux directs (AOD) soient peu prescrits en première ligne. En France, la suspicion est forte autour de ces nouvelles molécules qui font l’objet d’un programme de réévaluation mené par l’agence nationale du médicament et des produits de santé (ANSM). « Ces craintes sont largement répandues dans les pays où nous avons enquêté, reconnaît Joanna Chataway qui a dirigé la rédaction du rapport, ce qui souligne le besoin de former et d’informer les professionnels du premier recours », y compris sur les risques d’interactions médicamenteuses récemment découvertes entre les AOD et certains antiarythmiques comme l’amiodarone ou la dronedarone. « Avec ces médicaments, les taux plasmatiques d’AOD sont plus importants et restent élevés plus longtemps », note le Pr Camm.
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