LE DIAGNOSTIC de dépression se fera-t-il à l’avenir sur l’imagerie cérébrale ? Si ce scénario est (très) peu probable, il est néanmoins moins farfelu qu’il n’en a l’air. Des chercheurs américains viennent en effet de montrer qu’un amincissement du cortex cérébral de l’hémisphère droit est associé à un risque augmenté de dépression. La survenue de ce trouble de l’humeur pourrait passer par des troubles de l’éveil, de l’attention et de la mémoire sociale. Ce travail est quasi-pionnier dans l’étude de la neurobiologie du cerveau au cours de la dépression. Car si le rôle de facteurs génétiques et environnementaux est connu, savoir comment sont médiés leurs effets au niveau fonctionnel est encore assez mal décrit. L’équipe de Bradley Peterson a émis l’hypothèse qu’il existait des anomalies structurelles au niveau de l’hémisphère droit. En effet, il avait été montré antérieurement que l’activité pariéto-temporale droite à l’électroencéphalogramme était diminuée chez des sujets dépressifs.
Troubles de l’attention et de la mémoire visuelle.
Les chercheurs ont analysé l’imagerie cérébrale dans deux groupes de sujets, l’un à haut risque familial de dépression, l’autre à faible risque. Tous faisaient partie d’une cohorte suivie sur trois générations pour le risque dépressif. C’est sur les données psychiatriques de la première génération que les sujets ont été répartis en deux groupes. Ainsi, 131 sujets de la cohorte ont eu une imagerie cérébrale, 66 (12 enfants, 54 adultes) dans le groupe à haut risque et 65 dans le groupe à faible risque (31 enfants, 34 adultes). De manière attendue, la survenue d’une dépression s’est révélé être plus fréquente dans le groupe à haut risque, 37 % versus 15 % dans le groupe contrôle, et l’était également lors de la réalisation de l’imagerie. Les chercheurs ont constaté qu’il existait une réduction moyenne de 0,87 mm (0,55-1,36 mm) de l’épaisseur corticale de l’hémisphère droit, soit une réduction de 28 % par rapport au groupe à faible risque.
De plus, alors que l’hémisphère cérébral droit est impliqué dans l’attention et la mémoire visuelle, les chercheurs ont mis en évidence une corrélation entre l’amincissement du cortex et l’existence de déficits attentionnels et mnésiques. Ce serait surtout les troubles de l’attention qui seraient prédictifs de dépression et d’anxiété.
In utero ou petite enfance.
Comme l’analyse était identique chez les enfants et chez les adultes, il semble que les déterminants de cette anomalie se mettent en place très tôt dans le développement, soit in utero soit pendant la petite enfance. D’ailleurs, dans cette cohorte, les enfants et les adolescents du groupe familial à haut risque ont présenté davantage de troubles anxieux et dépressifs. Les auteurs s’interrogent sur la généralisation de leurs résultats à toutes les formes de dépression héréditaire. L’hétérogénéité des familles participantes laisse penser que l’amincissement cortical soit bien un mécanisme commun à de multiples facteurs de risque.
Proc Natl Acad Sci USA, édition avancée en ligne.
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