De nouvelles courbes de croissance intra-utérine ont été récemment proposées par le projet Intergrowth 21st, l’Organisation mondiale de la santé, le NICHD (National Institute of Child Health and Human Development) aux États-Unis et l’équipe EPOPé de l’Inserm. Et d’autres courbes pour les enfants de 0 à 18 ans ont été incluses dans les carnets de santé en avril (1).
Pourquoi ces initiatives ? Il s’agit de standardiser les pratiques et de produire de nouvelles courbes, car les nombreuses existantes sont souvent anciennes et critiquées sur les aspects méthodologiques. Par exemple, les courbes de poids fœtal estimé d’Hadlock, largement utilisées, ont été construites sur un échantillon comprenant une seule mesure échographique de 392 femmes à la fin des années 80. Quand les courbes de croissance pour les enfants après la naissance publiées en France en 1979 ne décrivent pas bien celle des enfants contemporains.
Les nouvelles courbes ont utilisé une approche innovante de type « big data » à partir d’environ 5 000 000 mesures de la taille, du poids et du périmètre crânien de 261 000 enfants de 0 à 18 ans (1).
À l'échelle d'une population…
Quelle courbe choisir ? Chaque pays doit-il développer les siennes propres, ou peut-on utiliser une norme de croissance universelle ? Les courbes de croissance de l’enfant de l’OMS et intra-utérines d’Intergrowth 21st ont été élaborées pour une utilisation mondiale, en partant du principe que la croissance est similaire dans toutes les populations si les besoins nutritionnels et de santé sont satisfaits. Mais ce principe fait l’objet de débats ; certains, partant du constat qu’il existe des différences entre les populations, recommandent que les références soient établies, ou au moins validées, à l’échelle nationale.
En France, la décision des chercheurs et des sociétés savantes pédiatriques a été de créer des courbes pour les enfants français, car les normes de l’OMS ne sont pas adaptées aux six mois suivant la naissance. L’adoption des normes Intergrowth 21st en France est également discutée, compte tenu des différences constatées dans la croissance des fœtus français.
... voire au niveau individuel
Enfin, des courbes de croissance individualisées, adaptées aux caractéristiques parentales comme la taille, ont été développées dans de nombreux pays. Ainsi, les courbes françaises intra-utérines EPOPé intègrent des informations sur la taille, le poids et la parité de la mère. Pour le suivi et l’interprétation de la croissance des enfants avec les nouvelles courbes françaises, il est recommandé de tenir compte de la taille des parents.
Mais la question la plus importante est de savoir comment utiliser les courbes pour mieux dépister les enfants à risque, intervenir et améliorer leur santé. Malgré l’échographie, les résultats des performances du dépistage au cours de la grossesse sont décevants. Par exemple, plus des deux tiers des nouveau-nés de faible poids ne sont pas dépistés pendant la grossesse. Il est donc important de définir le petit poids pour l’âge gestationnel, de choisir des courbes adaptées, et de standardiser les pratiques par des recommandations quant à leur utilisation (2). Tout changement de courbes doit faire l’objet d’un consensus professionnel large, et ses conséquences doivent être évaluées.
exergue : Les résultats des performances du dépistage du faible poids de naissance au cours de la grossesse sont décevants
Directrice de recherche Inserm U953
(1) Pour plus d’information sur les nouvelles courbes pour le suivi de la croissance des enfants en France : https://cress-umr1153.fr/index.php/courbes-carnet-de-sante/
(2) CNGOF. « Recommandations pour la pratique clinique. Le retard de croissance intra-utérin », 37
e Journées nationales du CNGOF, 2013 : www.cngof.asso.fr/data/RCP/CNGOF_2013_FINAL_RPC_rciu.pdf
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