À des niveaux très différents, les diabètes de type 1 et de type 2 sont tous deux à risque accru de fractures de fragilité en dépit d’une densité minérale osseuse (DMO) normale voire légèrement diminuée. Selon diverses méta-analyses, le risque de fracture de hanche est par exemple multiplié par 4,5 à̀ 7 en cas de diabète de type 1 et, de manière plus modérée, par 1,08 à 1,7 en cas de diabète de type 2 (1,16 concernant les fractures vertébrales).
« Ce que l’on appelle le “paradoxe de la diabétoporose” (soit un risque fracturaire non négligeable en dépit d’une DMO normale) s’explique par la détérioration de la microarchitecture osseuse, principalement due aux altérations métaboliques liées à l’hyperglycémie et à l’accumulation des produits de glycation avancée (AGEs) », détaille le Pr Sonia Cerdas Perez (hôpital Cima-San José, Costa Rica). Ceux-ci s’accumulent notamment dans le collagène osseux et peuvent fragiliser l’os. « Cette plus grande fragilité osseuse (d’ailleurs sous-estimée par les outils d’évaluation comme le Frax) s’explique aussi par une sarcopénie plus fréquente et une altération du tissu musculaire par infiltration adipeuse », poursuit le Pr Cerda Perez.
Globalement, la physiopathologie de la « diabétoporose » est complexe et implique de nombreux mécanismes médiés par une carence en insuline, une hyperglycémie chronique, les produits de glycation avancée, un stress oxydatif, une atteinte vasculaire, un déficit en incrétines, une hypersclérostinémie, entre autres. Elle est aggravée par une carence en vitamine D, un déséquilibre phosphocalcique, les complications chroniques du diabète sucré et même certains médicaments antidiabétiques dont on sait qu’ils sont capables d’abaisser la valeur de la DMO comme l’insuline au long cours et les glitazones (non disponibles en France). De plus, l’athérosclérose et la calcification des vaisseaux, associées à une inflammation chronique des vaisseaux de l’intima osseuse, augmentent la porosité corticale de l’os.
Établir un plan de prévention
Par conséquent, chez tout patient diabétique, de type 1 comme de type 2, « il faut penser à la santé osseuse, insiste le Pr Sonia Cerdas Perez, et établir un plan de prévention, avec une nutrition adéquate (apports suffisants en calcium et vitamine D), la promotion des exercices physiques de mise en charge et l’arrêt du tabagisme ». Chez les diabétiques ayant des facteurs de risque de fracture (durée de la maladie de plus de cinq ans, sous insuline, HbA1c > 7 % et/ou micro-macroangiopathie diabétique), il faut investiguer plus avant la qualité osseuse à la recherche d’une fragilité osseuse, en combinant par exemple l’évaluation de la DMO par DXA avec le TBS (score de structure trabéculaire de l’os). Ceci sans attendre la survenue de la fracture de fragilité ou la diminution de la hauteur vertébrale.
Selon le groupe de travail Bone and Diabetes de l’International Osteoporosis Foundation, il est recommandé d’intervenir lorsque la DMO est inférieure à -2 DS (ou en cas de score Frax indiquant un traitement), sans attendre de passer en dessous de -2,5 DS comme préconisé pour les patients non diabétiques, car le risque fracturaire chez les diabétiques est équivalent à celui du score de DMO de la population standard avec un T-score de 0,5 DS en moins.
À ce stade, « les données suggèrent que le diabète n’affecte pas la réponse aux traitements anti-ostéoporotiques », affirme le Pr Josipa Radic (hôpital universitaire de Split, Croatie).
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