« Aujourd’hui, il ne faudrait pas faire croire que le combat pour un bon usage des antibiotiques et contre le développement des résistances ne concerne que les pays riches. C’est un combat qui concerne les pays du monde entier, y compris les plus pauvres. Et en France, notre mission est d’abord de nous mobiliser en renforçant la coordination des actions qui ont été lancées ces dernières années, tout en réaffirmant le rôle central que doivent jouer les infectiologues dans ce combat », explique le Dr Hugues Aumaître, président du Syndicat national des médecins infectiologues et chef du service des maladies infectieuses du CH de Perpignan. « Il est notamment fondamental de réaffirmer que, partout où cela est possible, ce sont des infectiologues qui doivent assumer le rôle de référents en antibiothérapie », ajoute-il.
Ces dernières années, plusieurs textes réglementaires ou rapports ont été rédigés pour essayer de doter la France d’une politique visant à permettre un meilleur usage des antibiotiques. Un texte important a été la circulaire de 2002 qui a permis la mise en place de deux mesures : des référents antibiotiques dans les établissements de santé et des centres de conseils en antibiothérapie. « Dès le départ, cette politique du bon usage des antibiotiques a surtout été promue dans les établissements. Mais dans un certain nombre d’hôpitaux pro-actifs, comme le mien, il a été possible de s’ouvrir à la médecine de ville. Et de permettre aux collègues libéraux de solliciter de manière régulière le référent antibiotiques pour lui demander un conseil sur la prescription de tel traitement, de l’emploi de telle molécule, de la durée d’une prescription ou même de savoir si tel patient ne devait pas être hospitalisé », indique le Dr Aumaître.
Ces dernières années, plusieurs autres textes importants ont été publiés. « Les autorités de tutelle ont eu la volonté d’élargir cette action sur les antibiotiques à tous les secteurs de soins, en mettant un accent tout particulier sur la médecine de ville mais aussi sur les établissements médico-sociaux, en particulier les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) », indique le Dr Aumaître. Ainsi, en 2011, le ministère de la santé a d’abord présenté son Plan national d’alerte sur les antibiotiques (2011-2016). En juin dernier, la Direction générale de la santé (DGS) a diffusé une instruction relative au programme national d’actions de prévention des infections nosocomiales associées aux soins (Propias). Un document visant à s’appuyer sur le parcours du patient et à favoriser la mutualisation des moyens en « priorisant les actes les plus à risque ».
Toujours en juin 2015, la DGS a envoyé une autre instruction, relative à la mise en œuvre de la lutte contre l’antibiorésistance sous la responsabilité des Agences régionales de santé (ARS). Cela a été ensuite la publication du rapport « Tous ensemble, sauvons les antibiotiques », rédigé par la task force placée sous la responsabilité du Pr Jean Carlet (lire ci-dessus). En s’appuyant sur ce travail, la Ministre de la santé, Marisol Touraine, a annoncé le 23 septembre différentes mesures visant principalement à mieux coordonner les actions de lutte contre l’antibiorésistance. Avec l’annonce de la mise en place d’un référent antibiotique dans chaque ARS et le lancement en 2016 d’un plan national interdisciplinaire de recherche sur l’antibiorésistance. « Notre syndicat, qui a organisé en avril 2014 des assises sur l’antibiorésistance, est prêt à s’engager pour favoriser ce travail de coordination qui est important », souligne le Dr Aumaître.
Et selon ce dernier, il est important que les infectiologues continuent à faire entendre leur voix. « Aujourd’hui, l’antibiothérapie est enseignée dans toutes les spécialités médicales. Mais le problème est devenu d’une telle complexité qu’il faut vraiment que ce combat soit mené par ceux qui gèrent ces problèmes au quotidien. Et nous n’avons de cesse de rappeler au ministère l’engagement des infectiologues dans ce combat. Dans tous les établissements qui disposent d’un service de maladies infectieuses, le poste de référent doit être occupé par un infectiologue. Et ailleurs, il est indispensable que le référent soit en lien étroit avec un service d’infectiologie », indique le Dr Aumaître. « De même, il nous semble nécessaire que, dans les ARS, le prochain référent antibiotique soit un infectiologue, même s’il est logique qu’il puisse être secondé par un administratif », ajoute-il.
D’après un entretien avec le Dr Hugues Aumaître, président du syndicat national des médecins infectiologues et chef du service des maladies infectieuses du CH de Perpignan
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