En dehors du cadre strict de l’infectiologie, la réforme du troisième cycle des études médicales soulève un certain nombre de questions : de la relative réduction de la durée de formation pratique dans certaines spécialités (médecine interne, chirurgie), aux craintes sur le statut réel de l’interne senior lors de la dernière phase dite de mise en situation. Rajoutons en filigrane un salaire d’interne pour des responsabilités d’assistant et une réduction probable du nombre de postes disponibles après l’internat.
L’organisation pratique risque également d’être difficile : le passage en CHU obligatoire pour les internes de la première phase socle risque d’en limiter l’accès aux internes plus âgés si aucun nouveau poste n’est créé. Le problème de la validation des différentes phases est également posé, avec son corollaire : que faire en cas d’échec. Redoubler ? Et après ? Même si le fameux droit au remords est une pratique peu courante, il reste une possibilité de changer de voie en cas d’erreur de parcours, et la sectorisation de plus en plus grande des différentes spécialités rend les passerelles, déjà peu nombreuses, de plus en plus périlleuses.
Des effectifs réduits, une forte demande
Concernant plus spécifiquement notre spécialité, qui veut dire DES dit contrôle des effectifs. Et la question se posera de définir le nombre d’internes pouvant s’inscrire en DES d’infectiologie dans chaque université.
Car les besoins sont immenses, à l’heure de « l’antibiothérapie raisonnée ». La formation optimale de spécialistes en bon usage des anti-infectieux et en gestion du risque infectieux est plus que jamais nécessaire, avec l’augmentation des résistances, l’émergence de nouvelles menaces infectieuses. La demande est forte, à tel point que les Agences régionales de santé (ARS) ont reçu pour mission d’organiser le bon usage au niveau régional.
La spécialité a beaucoup évolué, depuis ses balbutiements et comporte aujourd’hui de réelles spécificités, qui demandent une expertise et une formation spécialisée que ne peut plus offrir le DESC, que ce soit dans la gestion d’infections complexes ou chez l’immunodéprimé, de stratégies antibiotiques en constante évolution, ou de gestion du risque infectieux. La formation dans le cadre du nouveau DES se doit donc d’être plus poussée, mais doit aussi être plus concertée au niveau national.
Homogénéiser la formation
Aussi, cette réforme est avant tout l’occasion de remettre à plat et d’homogénéiser la formation en infectiologie, avec des objectifs clairs, en mettant à profit toutes les nouvelles technologies disponibles en science de l’enseignement. En association avec les réformes sur le temps de travail des internes, c’est également l’occasion de consacrer un temps précieux dédié à la formation pratique mais aussi théorique, qui était parfois oubliée au profit des missions du quotidien. La spécialisation dès le début de l’internat est aussi l’occasion de mettre en place un véritable compagnonnage auprès des plus jeunes tout au long de leur cursus par un tuteur référent.
En revanche, l’homogénéisation ne doit surtout pas se faire en renonçant à de la diversité de formation que, déjà, le format DES limite par rapport à l’ancienne formule. Même si nous avons la chance de rentrer dans un co-DES d’une durée de 5 ans avec la médecine interne (ce qui peut paraître logique lorsqu’on regarde la répartition actuelle des inscrits au DESC, avec presque 50 % d’internistes), la spécialité unique se fait en effet au détriment de formations plus variées (médecine générale, dermatologie, pneumologie, néphrologie, pédiatrie…) qui étaient de réels apports d’expériences, de points de vue et de raisonnement.
Pour perdre le moins possible cette diversité de formation, il semble important de garder une maquette la plus libre et ouverte possible, afin de bénéficier au mieux des expériences dans d’autres filières. Par ailleurs, le nombre relativement faible de services agréés pour la formation en infectiologie est une excellente occasion pour répondre à la nécessité de postes. De plus, développer les terrains de stage atypiques, les échanges interrégionaux, nationaux et pourquoi par internationaux afin de garder le plus possible cet esprit d’ouverture qui, je l’espère, caractérise notre spécialité.
Chef de Clinique Assistant, Service de Médecine Interne et Maladies Infectieuses, CHRU de Tours
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