Après la publication du nouveau carnet de santé qui doit entrer en vigueur le 1er avril, l'INSERM publie les courbes de croissances réactualisées qui y ont été introduites.
Les courbes jusque-là disponibles - celles du carnet de santé français et celles de l'Organisation mondiale de la santé - étaient jugées dépassées ou « non optimales » par les professionnels de santé. En octobre 2016, la Direction générale de la santé a donc sollicité les chercheurs de l’unité INSERM 1153/CRESS pour une actualisation en vue du carnet de santé.
L'INSERM a opté pour une approche innovante de type « big data » soutenu par un partenariat public/privé. Un comité d’expertise composé de sociétés savantes et professionnelles* a présidé aux choix méthodologiques et épidémiologiques.
Une extraction massive de données
Les chercheurs ont pu recueillir et analyser 5 000 000 de mesures de poids, de taille ou de périmètres crâniens provenant de 261 000 enfants âgés de 0 à 18 ans.
Quelque 42 médecins tirés au sort parmi les pédiatres de l’Association française de pédiatrie ambulatoire (AFPA) et médecins généralistes ont ainsi fourni leurs données. La construction des nouvelles courbes a été menée en concertation avec les représentants des futurs utilisateurs afin de répondre au mieux à leurs attentes.
Les courbes « AFPA- CRESS/INSERM-CompuGroup Medical 2018 » de taille et de poids se situent « nettement au-dessus » des courbes précédentes.
Pus 5 cm en 40 ans
En ce qui concerne la taille, « à 10 ans, la médiane de la taille des filles » est d'après les nouvelles références « de 139,5 cm contre 134,7 cm sur les courbes tracées en 1979, soit quasiment 5 cm », indique l'INSERM. Cette différence qui amènerait à s'inquiéter sur la normalité de la croissance d’un nombre plus important d’enfants, a conduit à « prendre en compte dans l'interprétation la taille cible parentale dont la formule a été introduite dans les carnets de santé », précise l'INSERM. La taille cible parentale correspond à la moyenne de la taille du père et de la mère, à laquelle on ajoute 13 cm pour les garçons, ou on retire 13 cm pour les filles.
Pour ce qui est du poids, l'INSERM rappelle les recommandations de la Haute Autorité de santé selon lesquelles le repérage du surpoids et de l’obésité de l’enfant doit reposer sur le suivi de la courbe de corpulence (c’est-à-dire de l’IMC) et non de la courbe de poids. À partir de deux ans, les courbes de corpulence représentées dans le carnet de santé sont celles proposées par l’International Obesity Task Force (IOTF).
Repérage précoce avant 2 ans
En revanche, de nouvelles courbes réalisées par l'« AFPA-INSERM/CRESS-CompuGroup Medical 2018 » sont proposées avant 2 ans afin de mieux visualiser le pic de corpulence autour de neuf mois. Elles doivent « permettre de détecter précocement des maladies chez les enfants apparemment sains, sans pour autant inquiéter à tort les familles », explique Barbara Heude, chercheuse INSERM qui a coordonné ce travail avec Pauline Scherdel et Martin Chalumeau.
Les nouvelles courbes présentent d'autres changements parmi lesquels des courbes de poids et de taille différentes pour les garçons et les filles dès la période 0-3 ans. De même pour les courbes de périmètre crânien entre 0 et 5 ans qui elles aussi sont spécifiques garçon/fille.
« Des messages courts au fil des pages visent à sensibiliser parents et médecins à l’importance d’un suivi régulier de la croissance et insistent sur les paramètres devant être pris en compte pour l’interprétation des mesures », soulignent les chercheurs. Ainsi les périodes pubertaires normales sont indiquées pour inciter à leur utilisation dans l’interprétation des courbes.
Les chercheurs espèrent que leur « prouesse technique et scientifique » rendue possible grâce à une « low-cost big data » va permettre à d’autres équipes dans le monde de reproduire et d’améliorer cette stratégie visant à produire facilement des références anthropométriques calibrées.
* Société française de médecine générale, Société de formation thérapeutique du généraliste, Société française d’endocrinologie et diabétologie pédiatrique, Groupe francophone d’hépato-gastroentérologie et nutrition pédiatrique, Société française de neuropédiatrie, Société de néphrologie Pédiatrique, Groupe de pédiatrie générale et Groupe de pédiatrie sociale de la Société française de pédiatrie et association française de pédiatrie ambulatoire
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