Les dermatologues doivent connaître les plantes. Ils se souviennent du baume du Pérou. « Cet extrait végétal du Baumier, arbre d’Amérique tropicale, était il y a peu très utilisé pour ses propriétés cicatrisantes, notamment dans le tulle gras Lumière. Traitement miracle des plaies de jambes, il sensibilisait 60 % des utilisateurs ! Il est aujourd’hui quasiment banni des topiques », rappelle la Dr Avenel-Audran.
Les Anacardiacées sont la famille de plantes la plus ennuyeuse. La sensibilisation à l’urushiol est quasi constante au 1er contact (eczéma aigu d’aspect linéaire). L’arbre à laque du Japon (toxicodendron verniciflua), le poison ivy en Amérique du Nord (toxicodendron radicans), le Rhus toxicodendron en font partie. Ce dernier (Rhus Tox) utilisé en topique homéopathique (douleurs rhumatismales…) peut provoquer un eczéma de contact ré-activable lors d’une nouvelle prise, même en granules !
Les Astéracées, très répandues (arnica, camomille, marguerite…) contiennent des lactones sesquiterpéniques responsables de dermatoses aéroportées (parties découvertes, visage n’épargnant pas le triangle sous-mentonnier à la différence de photosensibilisation). Arnica, souci, camomilles utilisés en topique calmant sont à risque d’eczéma de contact, ré-activable en aéroporté (1) ou par infusion per os (2). Le laurier noble contient aussi des lactones sesquiterpéniques.
La primine, allergène de la primevère (présente dans la batterie standard) provoque un eczéma aigu (aéroporté, érythème polymorphe).
L’α-méthylène butyrolactone est responsable d’eczéma chronique au contact des tulipes et alstromères (Liliacées)
Le diallyldisulphide des Alliacées (ail, oignon) peut aussi provoquer un eczéma des doigts ou du scrotum (manuportage du cuisinier).
Attention aux huiles essentielles ! (3)
Elles sont issues de la distillation de plantes aromatiques comme les Lamiacées et Myrtacées, (lavande, menthe, eucalyptus, arbre à thé…) et utilisées tant en cosmétique qu’en thérapeutique.
« Elles exposent aux allergies de contact. Leurs composants nombreux et communs à différentes huiles s’oxydent à l’air ce qui favorise la formation de dérivés terpéniques très allergisants et les cosensibilisations », explique la Dr Avenel-Audran.
La Tea Tree Oil, la plus à risque, extraite de l’arbre à thé d’Australie, fait certes partie de la pharmacopée ancestrale des aborigènes, mais expose aux concentrations commercialisées à un risque notable de sensibilisation : allergie souvent sévère (eczéma systémique, érythème polymorphe like) et fréquemment croisée avec d’autres végétaux.
Comment s’y retrouver
Pour connaître le risque associé à l’utilisation de chaque plante, la Dr Avenel-Audran recommande www.botaderma.com, le site du Dr Jean-Claude Reznick, dermatologue à Fécamp, féru de botanique « Nous animons avec Jean-Claude et Jean-Louis Peyron depuis 2011 une formation médicale continue sur les intolérances aux plantes aux Journées Dermatologiques de Paris, « Ces plantes qui veulent notre peau ! » ».
D’après un entretien avec la Dr Martine Avenel-Audran, CHU Angers
(1) Lundh K et al. Contact dermatitis 2006;54:196-220
(1) Anzai A et al. Contact dermatitis 2015;72:25-13
(1) Groot AC. CRC Press 2016
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