Sous-diagnostic de la BPCO chez les femmes jeunes

Les stéréotypes ont la vie dure

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Publié le 09/11/2017
bpco femme jeune

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Crédit photo : PHANIE

On ne peut plus dire que la BPCO est une pathologie masculine, puisque sa fréquence chez la femme rejoint désormais celle de l’homme : 40 % des personnes souffrant de BPCO sont des patientes.

Dans certains pays (États-Unis, Autriche, Australie, Islande), la prévalence de la BPCO est déjà supérieure chez la femme (1).

Mais les stéréotypes ont la vie dure et la BPCO est particulièrement sous-diagnostiquée chez les femmes jeunes qui viennent consulter pour un essoufflement à l’effort et pour lesquelles les médecins pensent davantage à un asthme. Ce retard de diagnostic a un impact négatif sur l’évolution de la maladie.

« Le nombre de décès chez les femmes dus à la BPCO augmente de manière constante, de 1,7 % par an depuis la fin des années 1970. En France, 1 million de femmes seraient touchées » déclare la Pr Chantal Raherison (pneumologue au CHU de Bordeaux).

Par ailleurs, la prévalence de la BPCO fait état d’une évolution plus rapide chez les femmes que chez les hommes ainsi que d’une mortalité plus élevée. C’est le cas notamment aux États-Unis.

Une susceptibilité plus importante au tabac

Les facteurs de risque sont sensiblement différents chez les femmes et chez les hommes. Si la BPCO est essentiellement liée au tabac, les femmes ont une susceptibilité supérieure à ce dernier. Chez les femmes, au-delà de 45-50 ans, on constate une majoration du déclin du VEMS (p = 0,011), y compris pour un tabagisme modéré (< 15 cigarettes/jour) (2). Chez les jeunes filles fumeuses, on observe un ralentissement de la croissance pulmonaire dès 5 cigarettes/jour.

Les causes respiratoires au premier plan de la mortalité des fumeuses

La cohorte britannique Millenium, incluant 1,3 million de femmes suivies pendant 8 ans, a permis de montrer que les femmes fumeuses mouraient d’abord de causes respiratoires, et en particulier de la BPCO, puis du cancer du poumon et enfin de causes cardiovasculaires, comparativement aux non-fumeuses (3). « Jusqu’alors, on parlait surtout de mortalité liée à des causes cardiologiques. La cohorte Millenium a montré qu’il ne fallait pas négliger les causes respiratoires. » explique le Pr Chantal Raherison. Cette étude a également montré que la survie des femmes fumeuses était diminuée de près de 12 ans par rapport aux non fumeuses et que le risque de survenue d’une BPCO chez ces femmes existait même si le tabagisme n’était que de 5 à 10 cigarettes.

Plusieurs hypothèses pourraient expliquer ces différences entre les femmes et les hommes vis-à-vis de la BPCO : une hyperréactivité bronchique plus importante, un plus petit calibre des bronches, une sensibilité majorée à l’inflammation systémique voire la disparition du rôle protecteur des estrogènes après la ménopause ou encore le rôle du poids (4).

(1)  Mannino et al. Lancet 2007 ; 370 :765-773
(2)  Wen Qi Gan et al. Meta analyse de 11 cohortes : 55709 patients de 32 à 73 ans, suivis sur 5 à 29 ans. Respiratory Research 2006
(3)  Pirie Ka et al. The 21st century hazards of smoking and benefits of stopping : a prospective study of one million women in the UK. Lancet 2013 ; 381 :133-41
(4)  Raherison C et al. Existe-t-il des spécificités chez les femmes atteintes de BPCO ? Rev Mal Resp 2010 ;27 :611-624.

Christine Fallet

Source : lequotidiendumedecin.fr