Prévention des erreurs médicamenteuses

Mise à jour des recommandations

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Publié le 28/11/2016
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MISE A JOUR

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Crédit photo : PHANIE

« Suite à l'arrêté du 6 avril 2011 précisant le management de la qualité de la prise en charge médicamenteuse dans le cadre de la gestion a priori et a posteriori des risques et suite à la récente publication de recommandations australiennes dans la prise en charge des erreurs médicamenteuses en anesthésie - réanimation, il était indispensable de mettre à jour nos propres recommandations », précise le Pr Piriou (CHU Lyon). L'organisation à mettre en place ne doit pas se limiter aux blocs opératoires, mais exister partout où l'anesthésiste réanimateur est appelé à intervenir : salles de surveillance postinterventionnelle (SSPI), services de chirurgie, soins critiques, etc. Exemples choisis…

Gestion a priori du risque…

Il faut déployer une politique globale au sein des établissements pour limiter au maximum le choix des médicaments ; les armoires à pharmacie des services doivent être rangées en utilisant des étiquettes avec les mêmes codes de couleur sur lesquelles sont notées les dénominations communes internationales (DCI) des médicaments. « Pour notre spécialité, les plateaux d'anesthésie doivent être réalisés de façon homogène au sein de l'établissement et il doit exister une organisation au niveau des services pour assurer un rangement commun de toutes les tables d'anesthésie. Le potassium doit être banni de ces tables. En revanche, les seringues pré remplies, même si elles représentent un surcoût, diminuent les risques d'erreurs et ont donc leur utilité. En cas de changement de fournisseur d'un médicament, les pharmaciens doivent s'impliquer davantage dans les services pour conduire ce changement. Enfin, chaque service doit mettre en place un protocole commun de dilution, de préparation et d'étiquetage des médicaments dans les plateaux d'anesthésie », poursuit le Pr Piriou.

Toujours pour limiter les risques d'erreur, ce doit être la même personne, dans une même séquence de geste, qui prépare les médicaments et ce, sans interruption de tâche. De plus, une ampoule doit correspondre à une préparation et à un patient (pas de partage d'ampoules). « Bien que l'ANSM ait recommandé un étiquetage plus clair, nous avons encore trop d'ampoules en noir et blanc, qui se ressemblent toutes », regrette le Pr Piriou. Outre le médicament, la voie d'administration doit être vérifiée sur toute sa longueur avant l'injection pour limiter les erreurs de voies d'administration. Ces dernières restent rares mais graves lorsqu'elles concernent les voies les plus sensibles (cathéters périduraux, intrarachidiens, périnerveux, voie veineuse centrale, drains chirurgicaux et cathéters artériels). « Pour éviter ces erreurs, il est préconisé le contrôle actif de la voie avant injection et l'étiquetage de couleur spécifique de chaque voie d'abord. On attend dans les deux à trois ans à venir, des cathéters avec des embouts différents selon les voies d'abord. Cathéters et tubulures de couleur sont également préconisés. Pour lutter contre les erreurs de seringue, sont également préconisés le contrôle actif des informations et les étiquetages de couleur spécifiques (curare en rouge, morphiniques en bleu, hypnotiques en jaune, etc.). Si cette dernière mesure est déjà mise en place, nous sommes très en retard sur le recours aux codes-barres qui permettraient de scanner à la fois l'étiquette du patient et celui de la seringue pour obtenir une vraie traçabilité de ses traitements. Or certaines préparations sont réalisées à un endroit (par exemple en SSPI), mais administrées ailleurs (dans les services de chirurgie) sans que l'on ait aucune traçabilité de ce qu'il y a ! Pour y remédier, la préconisation est d'inscrire clairement sur une étiquette dédiée, la DCI du médicament, son dosage, la voie d'administration, la date et l'heure de la préparation ainsi que l'identification formelle de celui ou celle qui l'a réalisée, avec l'étiquette du patient ». Des étiquettes de ce type sont déjà mises en place en Australie (www.safetyandquality.gov.au/our-work/medication-safety/safer-naming-lab…).

…et a posteriori

Le personnel doit être incité à déclarer les erreurs médicamenteuses, ce qui demande en parallèle la mise en place de dispositifs de déclaration et de structures au sein desquelles ces erreurs feront l'objet de discussions selon la méthode REMED (revue des erreurs liées aux médicaments et dispositifs médicaux associés) - avec un rôle central des pharmaciens - afin de faire émerger un certain nombre de mesures correctrices et de proposer aux principaux intéressés des formations modernes reposant sur la simulation, le e-learning, etc.

D’après un entretien avec le Pr Vincent Piriou, Hospices civils de Lyon, membre du Comité analyse du risque de la Société française d'anesthésie réanimation (SFAR)

Dr Nathalie Szapiro

Source : Bilan Spécialiste